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Chirurgie

Publié le 03 mai 2015Lecture 8 min

Zones à risque en chirurgie dermatologique

M. LEVENTER*, A.M. DUMITRESCU*, G. DODAN*, G. GOLDMAN**, V. LICHON** - *Centre Dr Leventer, Bucarest, Roumanie ; **Division de dermatologie, Fletcher Allen Health Care, Université de Vermont, Collège de Médecine, États-Unis

Un nombre important de cancers de la peau nouvellement diagnostiqués apparaissent chaque année, principalement sur les zones photo-exposées, de sorte que la nécessité de la chirurgie dermatologique est de plus en plus évidente(1,2). Il y a aussi un intérêt accru pour les procédures cosmétiques et certaines d’entre elles consistent à intervenir sur les différentes zones du visage.
Afin d’éviter les complications, le médecin doit avoir une connaissance très précise de l’anatomie locale de la face et du cou. Le sectionnement des vaisseaux sanguins ne conduira pas à des dommages permanents chez la plupart des patients. D’autre part, la destruction des fibres nerveuses produira soit une déficience motrice, soit une déficience sensorielle, qui peuvent avoir des conséquences à long terme et ne sont pas facilement accessibles à d’autres traitements.
Dans la plupart des cas, ces structures peuvent être évitées en chirurgie à l’exception des situations où il existe un envahissement tumoral des fibres nerveuses, ou quand on observe une invasion périneurale sur les lames de microscopie en cas de chirurgie de Mohs.

L’anatomie et les fonctions des fibres nerveuses dans les plans sous-cutanés du visage Il y a sept zones à risque sur le visage et le cou et celles-ci sont résumées dans l’encadré. Il est essentiel pour le chirurgien de connaître les repères anatomiques corrects, la proximité d’autres structures importantes et d’identifier aussi les points où ces fibres nerveuses sont plus superficielles et donc risquent d’être blessées. Il faut aussi être conscient de certaines variétés anatomiques et ce fait aidera le médecin à éviter les effets secondaires inutiles(3).  Les nerfs supra-orbitaire et supra-trochléaire Ils proviennent de la branche ophtalmique du nerf trijumeau et fournissent l’innervation sensitive pour le front ipsilatéral médial, le cuir chevelu jusqu’au vertex, la paupière supérieure et l’arête nasale. Le nerf supraorbitaire émerge du trou supraorbitaire qui est situé sur l’arcade osseuse orbitaire supérieure sur la ligne médio-pupillaire. Le nerf supra-trochléaire se trouve à 1,5 cm du trou supra-orbitaire et il va vers le haut sur le bord interne de l’orbite(4) (figure 1). Une blessure de ces nerfs produit l’engourdissement ou des dysesthésies dans les zones innervées. Cela peut se produire au cours d’un lifting frontal coronal ou en disséquant le muscle corrugateur.   Figure 1. Nerfs supra-orbitaire et supra-trochléaire - repères anatomiques.    Le nerf infra-orbitaire Constitué de fibres de la branche maxillaire du nerf trijumeau, il détermine l’innervation sensitive de la paupière inférieure, du nez latéral, de la joue et de la lèvre supérieure. Il ressort du cuir chevelu osseux dans le trou infraorbitaire qui est situé sur la ligne médio-pupillaire à environ 1 cm au-dessous du rebord orbitaire (figure 2). Quand il est endommagé, il provoque un engourdissement des zones mentionnées ci-dessus, l’incapacité de soulever le coin de la bouche lors du sourire ; celà interfère souvent avec la capacité de manger et provoque une diminution significative de la qualité de vie(3) (figure 3).   Figure 2. Le nerf infra-orbitaire - repères anatomiques. Figure 3. Incapacité à soulever le coin de la bouche lors du sourire – effet de l’injection de la toxine botulique pour le blépharospasme.    Les nerfs zygomatique et buccal Ils proviennent du nerf facial. Ils sont faits de fibres motrices qui innervent les muscles zygomatiques majeurs et mineurs et levator labii superiori alaeque nasi. Pour définir les points de repère anatomiques où ils peuvent être trouvés, on doit dessiner un triangle avec le point culminant situé sur l’éminence malaire, suivi par une ligne qui va vers le bord postérieur de l’angle de la mandibule et le troisième point représenté par la commissure orale (figure 4). Les nerfs se situent dans le tiers supérieur de ce triangle. L’endommagement de ces structures conduira à l’abaissement de la lèvre supérieure et de la commissure orale (figure 5). Heureusement, les fibres nerveuses zygomatiques et buccales sont interconnectées, de sorte que la paralysie n’est généralement pas permanente. Les procédures qui comportent le plus haut risque de développer de telles complications sont la rhytidectomie profonde et aussi la chirurgie oncologique(3).   Figure 4. Les nerfs zygomatique et buccal - repères anatomiques. Figure 5. Affaissement droit de la lèvre supérieure et de la commissure buccale après l’enlèvement du carcinome basocellulaire avec la chirurgie micrographique de Mohs, l’implication des nerfs zygomatique et buccal.    Le nerf temporal est un nerf moteur qui est une branche du nerf facial et qui fournit des fibres au muscle frontal, à la partie supérieure du occuli orbicularis et corrugator supercilii. La zone de danger est un triangle avec la ligne postérieure qui passe entre la face supérieure du lobe de l’oreille et la pointe latérale de la plissure la plus élevée du front ; la ligne inférieure peut être tirée de nouveau à partir du lobe de l’oreille à l’extrémité latérale du front et la limite antérieure relie les extrémités des deux premières lignes(3) (figure 6). Une blessure de ce nerf entraîne une paralysie du muscle frontal ipsilatéral (figure 7). Le patient va développer un affaissement du sourcil avec l’aplatissement des plis du front et une diminution de la capacité à fermer les yeux entièrement. Heureusement, le muscle occuli orbicularis a une double innervation et l’œil peut donc être fermé en cas de lésions à ce nerf. Du fait que les fibres courent assez superficiellement dans le triangle mentionné ci-dessus, il peut être endommagé lors de l’exécution des différentes procédures chirurgicales dans cette zone(4).   Figure 6. Le nerf temporal - repères anatomiques. Figure 7. Ptose des sourcils après le sectionnement du nerf temporal pendant la chirurgie micrographique de Mohs pour carcinome basocellulaire récurrent sur la tempe droite.    Le nerf mentonnier Il provient de la branche mandibulaire du nerf trijumeau. Il fournit l’innervation sensitive pour la moitié de la surface muqueuse et cutanée de la lèvre inférieure et du menton. Il ressort de la mandibule à la jonction entre la ligne médio-pupillaire et la base de la deuxième prémolaire(3) (figure 8). Une blessure à ce nerf peut se produire pendant les procédures d’augmentation de menton, ce qui entraîne un engourdissement des zones mentionnées ci-dessus et une difficulté à retenir la nourriture dans la bouche. Certains patients se plaignent aussi de se mordre la lèvre lors de la mastication et dans de rares cas, il existe une incapacité à jouer des instruments à vent.   Figure 8. Le nerf mentonnier - repères anatomiques.    Le nerf mandibulaire marginal C’est une branche du nerf facial. Il fournit des fibres motrices pour le muscle depressor anguli oris. Il peut être trouvé à 2 cm de côté et 2 cm sous la commissure buccale dans un cercle de 1 cm de diamètre(3) (figure 9). Quand il est endommagé, liposuccion du cou ou chirurgie des tumeurs par exemple, le patient ne peut pas tirer le coin ipsilatéral de la bouche et de la lèvre inférieure. Cependant, si le patient con tracte le muscle peaucier du cou, la lésion du nerf mandibulaire marginal n’est pas tellement évidente (figure 10).   Figure 9. Le nerf mandibulaire marginal - repères anatomiques. Figure 10. Incapacité à tirer le coin gauche de la bouche après lifting du cou, implication du nerf mandibulaire marginal.    Le triangle postérieur du cou Il contient deux structures nerveuses importantes : le nerf grand-auriculaire et le nerf spinal accessoire. Il est délimité en avant par le bord postérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien, en bas par le tiers moyen de la clavicule et en arrière par le bord antérieur du muscle trapèze(4). • Le nerf grand-auriculaire est un nerf sensitif émergeant du plexus cervical à la pointe de Erb (figure 11). Il fournit une innervation sensitive de la peau recouvrant la glande parotide, l’oreille externe et la région auriculaire postérieure. L’endommagement de cette structure conduit à un engourdissement des zones mentionnées ci-dessus. Figure 11. Nerf grand-auriculaire sectionné pendant le prélèvement de tissu pour un carcinome basocellulaire géant dans la chirurgie micrographique de Mohs.   • L’autre structure importante contenue dans le triangle postérieur du cou est le nerf spinal accessoire. Il est également connu comme le nerf crânien XI. Il se compose de fibres motrices qui alimentent le muscle trapèze et le muscle sterno-cléido-mastoïdien (figure 12). Quand il est blessé, cela conduit à une épaule tombante au repos, à une altération de la capacité de hausser l’épaule homolatérale et à une difficulté à tourner la tête dans la direction opposée (figure 13). Figure 12. Le nerf spinal accessoire. Figure 13. Lésions du nerf spinal accessoire, incapacité de hausser l’épaule droite.   La gestion des lésions nerveuses est toujours une tâche difficile. Certaines fibres nerveuses peuvent guérir spontanément en fonction du degré du traumatisme. Ce processus peut prendre de quelques mois à quelques années et la plupart du temps cela ne mènera pas au rétablissement complet. La majeure partie de la guérison a lieu dans les premiers mois et elle diminue de façon significative après la première année. Une intervention chirurgicale est généralement destinée aux nerfs moteurs endommagés. Les réparations nerveuses primaires ou les greffes nerveuses peuvent être effectuées afin de restaurer la fonction normale du muscle affecté, pour obtenir la symétrie des mouvements du visage et pour avoir une apparence normale au repos(5,6).   Conclusion Les dermatologues qui pratiquent des interventions chirurgicales et des procédures cosmétiques doivent avoir une connaissance approfondie de l’anatomie locale. Cela permettra d’éviter les complications spécifiques et aidera également le médecin à informer le patient sur les risques possibles de la procédure qui doit être entreprise. Les fibres nerveuses sensitives sont plus souvent touchées par des interventions chirurgicales avec incisions, piégeages de suture ou pansements compressifs. Les nerfs moteurs sont généralement protégés parce que le plan de dissection réside surtout dans le plan sous-cutané qui recouvre le système musculoaponévrotique superficiel (SMAS). Néanmoins, il existe des cas de tumeurs volumineuses ou des procédures de rhytidectomie qui peuvent nuire à ces structures et provoquer des lésions temporaires ou même permanentes. La meilleure gestion des lésions nerveuses est la prévention. Cela signifie que la connaissance des repères et des variations anatomiques, une formation approfondie dans les procédures chirurgicales et esthétiques et une préparation minutieuse de chaque traitement sont obligatoires afin d’obtenir les meilleurs résultats et d’éviter les complications indésirables(6).

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