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Congrès

Publié le 03 avr 2006Lecture 4 min

64e réunion de l'American Academy of Dermatology. Immunomodulateurs topiques : de l'enthousiasme à la polémique

Dr Wafa Ouazzani
AAD - San Francisco. Le pimécrolimus et le tacrolimus, qui sont des immodulateurs topiques, ont été approuvés par la FDA il y a un peu plus de trois ans pour le traitement de la dermatite atopique à partir de l'âge de 2 ans. De nombreuses études, à long terme et à court terme ont en effet démontré l'efficacité de ce traitement, même chez les enfants en bas âge. Leur utilisation permet en particulier de ne pas recourir à la corticothérapie ou d'en réduire la dose.
Nancy Anderson a par ailleurs rappelé que ces deux immunomodulateurs avaient beaucoup d'autres utilisations potentielles en dermatologie. Ils sont capables de faire régresser l'érythème et le prurit de la dermatite séborrhéique ainsi que l'érythème dans la rosacée. Le pimécrolimus à 1 % a été testé dans les dermites des ménagères chroniques où il s'est avéré efficace et sûr. Il en est allé de même pour le tacrolimus dans l'eczéma allergique de contact au nickel. L'application de tacrolimus à 0,1 % (deux fois par jour pendant 6 semaines) dans le psoriasis inversé à la fois au niveau des plis et du visage, donne d'excellents résultats. Le lichen plan de la muqueuse buccale peut également être traité avec une crème à 1 % de pimécrolimus qui entraîne une diminution des lésions en une à 4 semaines. Dans le vitiligo un traitement par tacrolimus à 0,1 % pendant 24 semaines, aboutit à un taux de repigmentation de 75 % sur le visage et sur le cou Ces différentes observations expliquent que Elidel* et Protopic* soient très prisés aux Etats-Unis. Du moins l'étaient-ils jusqu'à ce mois de janvier 2006 où la FDA a émis des réserves sur les risques de cancer potentiellement associés à ces traitements. Ces réserves ont été largement reprises par les médias américains y compris sur la chaîne câblée CNN. David Margolis, épidémiologiste en Pennsylvanie, a largement commenté cette position au cours de ce congrès de l'AAD. Il est un fait, a-t-il reconnu, que le pimécrolimus et le tacrolimus, lorsqu'ils sont administrés per os chez les patients greffés, induisent une immunosuppression intense favorable au développement de cancers (lymphomes, cancers cutanés). Il est également vrai que les deux molécules peuvent se retrouver dans le sang après application sur la peau. Cependant, la situation est très nettement différente entre une administration systémique au long cours telle qu'elle est observée en prévention du rejet de greffe, et une administration topique sur des surfaces limitées et pendant de courtes périodes, telle qu'elle est conduite au cours de la dermatite atopique. Par ailleurs les autres traitements prescrits dans la dermatite atopique (DA) : corticothérapie et PUVA thérapie exposent à une augmentation du risque de cancer. A l'heure actuelle, seules six études ont évalué spécifiquement le risque de lymphome dans la DA et les résultats n'en sont pas significatifs du fait de nombreux facteurs de confusion. De même le Medwash (pharmacovigilance aux Etats-Unis), a permis de retrouver 40 à 50 cas de cancers chez des patients utilisant ces deux immunomodulateurs, mais sans que l'on puisse établir une augmentation statistiquement significative du risque de cancer. Selon D Margolis, il n'est même pas exclu que les sujets traités par ces deux agents présentent moins de cancers cutanés. Autrement dit nous n'aurons pas de réponse à la question de l'innocuité, sur ce plan, des immunomodulateurs topiques avant plusieurs années. Tout au plus peut-on se prévaloir du fait que les cas de cancer rapportés sont très rares et que dans les indications dermatologiques les traitements sont de courte durée et donc peu susceptibles d'engendrer un risque accru de cancer. En attendant la FDA a demandé une « black box warning » pour les deux crèmes. La prescription doit en suivre des règles comparables à celles qui prévalent pour l'isotrétinoïne : remise de brochures (où il est signalé que l'innocuité à long terme n'est pas établie et que le risque de lymphome et de cancers cutanés pour ces deux molécules n'est pas établi), signature d'un formulaire de consentement éclairé, initiation après échec des autres traitements. Quant à l'American Academy of Dermatology, elle a exprimé le 19 janvier 2006 son désaccord avec la FDA qui, dit elle, se base sur des études menées par des oncologues et dont les résultats ont été mal interprétés. Et d'enfoncer le clou en considérant que le seul problème avec les immunomodulateurs topiques est qu'il sont trop peu utilisés eu égard au grand potentiel thérapeutique qu'ils offrent pour la prise en charge de nombreuses dermatoses.

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