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Psoriasis

Publié le 06 avr 2008Lecture 10 min

Quels critères de gravité du psoriasis utiliser ?

P. HUMBERT, Service de Dermatologie, CHU Saint-Jacques, Besançon
Le psoriasis concerne aujourd’hui de 1 à 3 % de la population mondiale et 3 à 5 % de la population européenne. Cette pathologie touche plus d’un million de Français et se caractérise par l’extrême polymorphisme de ses manifestations cliniques et de gravité de la maladie.
Dans la plupart des cas, le psoriasis est une maladie bénigne responsable d’un aspect inesthétique des zones corporelles lésées et de difficultés psychologiques pour le patient ; néanmoins chez 10 % des patients, le psoriasis est grave, la sévérité pouvant relever de l’étendue, de l’intensité, du vécu des lésions, des atteintes extracutanées (notamment articulaires) ou de l’altération de la qualité de vie. Environ un quart des patients atteints de psoriasis doivent être traités par photothérapie, traitements systémiques (méthotrexate, rétinoïdes, ciclosporine), ou l’association de ces deux traitements. Les scores d’évaluation du psoriasis dans les essais cliniques Ils permettent d’évaluer de manière objective les différents marqueurs de gravité de cette dermatose (tableau 1).   Tableau 1. Les principaux scores d’évaluation du psoriasis utilisés en recherche clinique. Scores -------------- Paramètres évalués PASI  SAPASI  PSI  PASS  RT et E-PAP  Erythème •  •   •  •  Desquamation  •  •  •  •  •  Induration / Infiltration •  •  •  •  •  Surface cutanée atteinte  •  •  •  •  •  Evolutiobité du psoriasis         •  Co évaluation par le patient    •        Durée de rémission          •    Chacun de ces scores prend en compte la surface cutanée atteinte, qui reste un élément incontournable dans toutes les méthodes d’évaluation objective du psoriasis. Le Psoriasis Area Severity Index (PASI) Peu ou pas utilisable en pratique quotidienne, de par sa complexité, il reste pourtant aujourd’hui le score de référence dans les essais cliniques menés dans le psoriasis. La gravité est jugée sur l’évaluation quantitative de plusieurs paramètres :   Les lésions élémentaires (érythème, infiltration, desquamation) sont cotées sur une échelle de 0 à 4. Mais si l’érythème est un paramètre relativement facile à quantifier, l’infiltration est moins bien définie ; il peut s’agir de l’épaisseur des squames ou de celle de la papule psoriasique. De même pour la desquamation, faut-il prendre en compte l’intensité de la desquamation et l’épaisseur des squames ?   Les surfaces atteintes sont définies en 4 groupes : la tête, le tronc, les membres supérieurs et les membres inférieurs. • L’étendue des lésions pour chaque groupe est ensuite établie en pourcentage. L’ensemble des paramètres ainsi définis est intégré dans une équation pondérant chaque paramètre. Le résultat établit ainsi un score PASI dont la valeur est comprise entre 0 et 72. Le PASI, peu ou pas utilisable en pratique quotidienne, reste le score de référence dans les essais cliniques. Les limites du PASI (encadré) sont à l’origine de la multiplication de scores dérivés, dont les principaux sont évoqués ci-après. Aucun n’est pourtant utilisable en pratique dermatologique quotidienne. Le Psoriasis Global Assessment (PGA) Le PGA est le système le plus souvent utilisé dans les essais cliniques après le PASI pour évaluer la sévérité du psoriasis. Le PGA (encore appelé Physician’s ou Investigator’s Global Assessment) donne à l’investigateur une estimation de la sévérité globale de l’affection du patient (tableau 2).   Tableau 2. Description clinique du PGA. 5 Sévère  et/ou érythème Élévation très marquée de la plaque  4 Modéré à sévère  Élévation marquée de la plaque et/ou érythème  3 Modéré  Élévation marquée de la plaque et/ou érythème 2 Léger  Légère élévation de la plaque et/ou érythème  1  Minime  Intermédiaire entre moyen et clair  0  Clair   Aucun signe de psoriasis (une hyperpigmentation post-inflammatoire peut être présente)   Il utilise une échelle de 0 à 7 (de léger à sévère) et évalue la sévérité de l’affection d’une façon plus intuitive que le score de 0 à 72 donné par le PASI. Dans la plupart des versions du PGA, les éléments individuels, tels que la morphologie de la plaque de psoriasis ou son degré d’extension sur le corps, ne sont pas pris en compte. Citons cependant le Lattice System Physician’s Global Assessment (LS-PGA), qui donne une approche quantitative (échelle de 0 à 8) de l’évaluation globale de la sévérité du psoriasis en prenant en compte le pourcentage de la surface corporelle atteinte et surtout la morphologie de la plaque (qui est elle-même évaluée par une échelle allant de 0 à 4, de rien à très marquée). Le LS-PGA donne plus d’importance à l’élévation de la plaque qu’à son apparence et à l’érythème dans la détermination d’un score clinique final : l’apparence de la plaque peut en effet varier avec l’hydratation ou avec les émollients, et la rougeur peut être induite par les conditions ambiantes et différents facteurs. Par ailleurs, l’élévation de la plaque, plus que l’apparence et la rougeur de la plaque, dépend de l’inflammation locale et de la prolifération. À tel point qu’elle est en général considérée comme le signe clinique le plus significatif des trois. Le LS-PGA peut être utilisé, par exemple, lorsque le PASI est  difficile à utiliser ou lorsque le score final numérique n’a pas de signification clinique. Le LS-PGA a l’avantage de définir clairement la méthode de quantification de la sévérité du psoriasis et de fournir une description clinique du résultat. Le Self Administered PASI (SAPASI) Le SAPASI est un score sensible et reproductible. Il présente l’originalité et l’intérêt de reposer sur une auto-évaluation par le patient, associée à un contrôle clinique par le dermatologue. Ses principales limites sont liées à la divergence des cotations entre le médecin (qui peut sous-estimer la gravité de la pathologie) et le patient (qui peut la surestimer en raison du lourd impact psychologique de la dermatose), et à la difficulté de l’appréciation de l’infiltration. Le Psoriasis Severity Index (PSI) Le PSI est un calcul qui ne repose pas sur l’érythème (point critique du PASI), qui peut s’accentuer chez les patients en voie de guérison sous PUVAthérapie. Ce score a l’avantage d’être sensible aux changements de l’étendue de la dermatose, particulièrement quand la surface atteinte est < 10 % de la surface globale. Le Salford Psoriasis Index (SPI) Le SPI comporte trois composantes : signes (S), psychologic disability (P) (retentissement psychologique) et intervention (I). Ce score permet d’apprécier l’impact psychologique du psoriasis et d’avoir une vue d’ensemble sur la gravité de la dermatose et la difficulté de la prise en charge individuelle du patient. Sa principale limite est de s’appuyer également sur le score PASI. Comme le PASI ne permet pas de préciser l’évolutivité du psoriasis et la durée de rémission après guérison, deux indices ont été créés : le Response to Treatment (réponse au traitement, RT) et l’Evaluation for Prognosis with Average PASI (évaluation du pronostic avec PASI moyen, E-PAP). Quelle définition retenir aujourd’hui de la sévérité du psoriasis ? Le développement clinique des biothérapies s’est appuyé sur une définition du psoriasis sévère correspondant à un score PASI Ž 12 et un BSA (Body Surface Area) > 10 %. Toutefois, comme nous l’avons souligné, le score PASI n’est pas adapté à la pratique clinique quotidienne et rend nécessaire un autre mode d’évaluation de la gravité du psoriasis. Deux documents officiels récemment publiés proposent des approches intéressantes pour évaluer plus simplement la gravité du psoriasis (tableaux 3 et 4). Les essais cliniques des biothérapies reposent sur une définition du psoriasis sévère correspondant à un score PASI ≥ 12 et un BSA (Body Surface Area) > 10 %. La règle des « 10 » A. Y. Finlay a récemment établi une règle de mémorisation aisée pour aider à définir ce qu’est un psoriasis grave ; en pratique clinique, il s’agit de la règles des « 10 ». Ainsi le psoriasis est-il considéré comme grave si la surface corporelle atteinte est > 10, ou si le score de qualité de vie (DLQI) est > 10, ou si le PASI est > 10. L’évaluation de la gravité du psoriasis en pratique quotidienne Il est intéressant de constater que les définitions de la sévérité ou de la gravité du psoriasis proposées par les instances officielles ne s’appuient pas sur le score PASI (celui-ci ne constitue qu’un outil alternatif dans les recommandations de l’EMEA), mais sur une évaluation beaucoup plus adaptée à la pratique quotidienne intégrant à la fois le point de vue du médecin, celui du patient et l’historique des traitements (tableaux 3 et 4).   Tableau 3. Définition de la sévérité du psoriasis faite par l’EMEA.   Psoriasis léger à  modéré  Psoriasis modéré  Psoriasis modéré à sévère  Psoriasis sévère  Historique traitements  Topiques efficaces  Topiques possibles pour contrôler la maladie   Echec des traitements topiques  Traitement systémiques nécessaires  Surface cutanée atteinte ou   PASI  < 10 %      < 10  > 10 %     ≥ 10 > 10 %  (ou < 10 % si lésions très épaisses dans zones difficiles à traiter)   10 à 20   > 20 % (ou > 10 % si signes cliniques très importants et lésions très épaisses danszones difficiles à traiter) > 20 Avis global du médecin   Léger à modéré  Modéré   Modéré à sévère  Sévère    Tableau 4. Patients éligibles à l’étanercept selon la Commission de transparence. • Surface corporelle atteinte ≥ 30 % ; • Retentissement psycho-social important ; • Échec, intolérance ou contre-indication à au moins 2 précédents traitements   systémiques parmi la photothérapie, le méthotrexate et la ciclosporine.     L’avis du dermatologue s’appuiera en particulier, conformément aux recommandations émises par l’EMEA, sur l’étendue de la surface cutanée atteinte (une paume de main équivaut à environ 1 % de la surface cutanée), l’évolutivité des lésions (l’existence d’un prurit ou l’apparition de nouvelles lésions sont des facteurs péjoratifs) et, plus encore, sur la localisation des lésions (à surface cutanée atteinte équivalente, un psoriasis sera considéré comme d’autant plus sévère que les lésions se situent sur des zones découvertes, dites « affichantes »). L’existence d’un prurit ou l’apparition de nouvelles lésions sont des facteurs péjoratifs.   En miroir de cette évaluation objective effectuée par le médecin, l’appréciation du retentissement pour le patient est également une dimension indispensable à prendre en compte.   De nombreux instruments de mesure de la qualité de vie ont ainsi été développés. Certains autoquestionnaires assez faciles à remplir par le patient, tels que le DLQI ou le VQ-Derm, peuvent être utilisés pour évaluer l’impact du psoriasis sur la qualité de vie, mais plus simplement encore, ce rententissement peut être apprécié sur une échelle visuelle analogique allant de « aucun retentissement » à « retentissement insupportable », par exemple. Conclusion   La mise à disposition des biothérapies nécessite aujourd’hui de préciser la définition clinique d’un psoriasis modéré à sévère pour qu’elles puissent être proposées aux patients éligibles à ces traitements.   Le score PASI n’étant pas adapté à la pratique quotidienne, il nous semble que cette évaluation doit intégrer trois grandes dimensions : l’évaluation objective des lésions effectuée par le médecin, l’évaluation de l’impact de ces lésions sur la qualité de vie du patient, mais également, évidemment l’historique du traitement.   Il nous reste maintenant à intégrer ces trois dimensions dans un outil utilisable en pratique quotidienne pour évaluer rapidement la gravité d’un psoriasis…

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