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Acné

Publié le 29 juin 2020Lecture 6 min

Acnés professionnelles

Marie-Noelle CRÉPY, Service de pathologie professionnelle, hôpital Hôtel-Dieu, Paris Service de dermatologie, hôpital Cochin, Paris

L’acné ou des éruptions acnéiformes peuvent être provoquées par l’exposition à certains facteurs professionnels et environnementaux :

  • par contact cutané pour les huiles et graisses d’origine minérale ou de synthèse, les dérivés de houille, goudrons, créosote et brai ;
  • par intoxication systémique (chloracné) pour les dioxines et les hydrocarbures polyaromatiques halogénés. 
Acné aux huiles C’est la plus fréquente des acnés professionnelles. Les agents responsables sont les huiles industrielles, principalement les huiles de coupe entières utilisées pour la lubrification et le refroidissement lors de travaux d’usinage mécanique des métaux, les huiles de moteurs, les graisses, les lubrifiants, les huiles de décoffrage, les huiles d’extension dans l’industrie du caoutchouc, les huiles d’ensimage de fibres textiles ou de fibres minérales, les huiles de démoulage et d’encres grasses dans l’imprimerie, le pétrole brut, les carburants diesel et kérosène(1). Les professions exposées sont les métallurgistes sur machines-outils (tourneurs, fraiseurs, rectifieurs, perceurs, aléseurs, régleurs, décolleteurs), les mécaniciens automobiles et de l’aéronautique, les employés de raffinerie et de l’industrie du caoutchouc, les employés du bâtiment et des travaux publics utilisant des huiles de décoffrage du béton, les couvreurs et les employés du secteur textile exposés aux huiles d’ensimage de fibres textiles. Leur incidence a diminué depuis le remplacement des huiles de coupe entières par des fluides aqueux et l’amélioration des mesures de prévention. L’exposition professionnelle à ces agents peut entraîner une folliculite encore appelée boutons d’huiles (ou élaïokoniose folliculaire). Le contact peut être direct (projections d’huile sous pression) ou indirect par des vêtements souillés. Cliniquement, ce sont des papulopustules souvent prurigineuses, de topographie évocatrice sur les zones pileuses des cuisses, des avant-bras et du dos des mains. Le traitement est identique à celui de l’acné. La prévention est essentielle pour éviter le contact avec les huiles et les graisses. Les vêtements doivent être régulièrement nettoyés et changés. Acnés aux dérivés de houille, goudrons, créosote et brai L’exposition aux goudrons de houille, huiles de houille, brais de houille et suies de combustion du charbon peut provoquer de l’acné (figure 1). Figure 1. Boutons d'huile chez un mécanicien exposé aux huiles et graisses minérales. Les professions exposées sont le personnel de cokeries, surtout ceux affectés à la marche ou à l’entretien des fours ou à la récupération et au traitement des goudrons, le personnel effectuant des travaux de ramonage et d’entretien de chaudières et foyers à charbon, les employés de fabrication des électrodes, de l’industrie de l’aluminium et de l’électrométallurgie. Ces composés sont également phototoxiques et cancérigènes. Les lésions prédominent aux zones exposées (notamment pour le brai de houille) les régions malaires et périorbitaires sous forme de comédons(2,3). La prévention repose sur l’éviction du contact cutané, des équipements de protection individuelle adaptés, régulièrement nettoyés et changés et des systèmes de ventilation efficaces. Chloracné La chloracné est due à une intoxication systémique par des substances chimiques, principalement les dioxines et les polychlorophényles. Elle est actuellement exceptionnelle dans les pays occidentaux industrialisés. Dioxines Les dioxines sont des hydrocarbures aromatiques halogénés comprenant 2 familles, les polychlorodibenzo-p-dioxines (PCDD), et des composés dits dioxineslike, les polychlorodibenzofuranes (PCDF). Les sources d’exposition sont essentiellement liées aux procédés industriels(4). Les dioxines sont produites lors de procédés industriels faisant intervenir de fortes températures (tels que les usines d’incinération, les fours de cimenteries, les raffineries de pétrole, la sidérurgie, les fonderies et raffineries de métaux non ferreux) et par divers procédés industriels (production de certains pesticides, industrie des polychlorophénols particulièrement dans des herbicides, des chlorodiphényléthers, des polychlorobiphényles, blanchiment du papier, etc.)(4). Les autres sources d’exposition sont soit biologiques soit accidentelles(4). Le sol constitue un réservoir important de dioxines dû à l’utilisation intensive de polychlorobiphényles, de pesticides et du bois massivement traité au pentachlorophénol. Les sources d’exposition non professionnelle sont les accidents industriels d’usines de production de polychlorophénols comme l’accident de Seveso en 1976, sans oublier les empoisonnements comme le cas du Président ukrainien Victor Yushchenko en 2004(5). Les données récentes montrent une tendance générale à la réduction des émissions dans l’air de dioxines, principalement dues aux actions visant à réduire les émissions des incinérateurs. La toxicité de ces molécules est évaluée par un coefficient de toxicité (toxicity equivalence factor [TEF]) qui représente une fraction de la toxicité de la 2,3,7,8-tétrachlorodibenzo-p-dioxine ou TCDD (dioxine de Seveso), molécule de référence à laquelle est attribuée une valeur de 1. La TCDD est considérée comme la plus toxique. Sa demi-vie d’élimination est approximativement de 7 à 11 ans. Polychlorobiphényles La chloracné a été rapportée lors de l’exposition aux polychlorobiphényles (PCB). Ils ont été utilisés comme isolants diélectriques dans les appareils électriques tels que transformateurs et condensateurs. Chloronaphtalènes Ils ont été incriminés chez le personnel employé à leur préparation, emploi, et/ou manipulation et aux produits en renfermant : fabrication de vernis, enduits, produits d’entretien, pâtes à polir, etc., a base de chloronaphtalènes ; emploi des chloronaphtalènes comme isolants électriques, en particulier dans la fabrication des condensateurs ; préparation et emploi de lubrifiants de remplacement contenant des chloronaphtalènes. Autres Citons également les dibenzofuranes polyhalogénés, les composés azo et azoxybenzènes, les dibenzofuranes polychlorinés, les triazoloquinoxalines (sept cas rapportés chez des chimistes d’une industrie pharmaceutique exposés à des triazoloquinoxalines[6]) et le sodium 3,5,6-trichloropyridin-2-ol, intermédiaire de fabrication du chlorpyrifos (insecticide organophosphoré). Points forts L’exposition à certains facteurs professionnels et environnementaux peut entraîner des acnés : acné aux huiles, aux dérivés de houille, goudrons, créosote, brai et chloracné. La chloracné est très rare dans les pays occidentaux industrialisés. Elle est due à l’exposition professionnelle ou environnementale, à des hydrocarbures polyaromatiques halogénés et à une intoxication systémique.   La prévention et la prise en charge de l’acné professionnelle nécessitent l’éviction (ou la réduction) de l’exposition à l’agent chimique incriminé, le port d’équipements de protection individuelle adaptés, l’éducation à la prévention du personnel exposé et le traitement. Diagnostic clinique Deux signes sont caractéristiques de la chloracné : la disparition des glandes sébacées (contrairement à l’acné où il y a hypertrophie des glandes sébacées) et l’apparition de kystes ressemblant à des comédons (figure 2). Pour Saurat, le terme de chloracné est impropre(7). Il suggère de le remplacer par le terme MADISH pour metabolizing acquireddioxin skin hamartomas. La chloracné est caractérisée par des kystes superficiels ressemblant à des comédons ouverts non inflammatoires, souvent de grande taille, pouvant confluer en plaques noires, et des kystes plus profonds dans le derme. Leur topographie est très évocatrice du diagnostic : au visage, principalement les régions rétroauriculaires, mandibulaires et malaires (le nez est souvent épargné), mais aussi sur les régions génitales. Les autres signes plus ou moins associés sont cutanés (élastose actinique, xérose, hyperpigmentation, hypertrichose, hyperkératose folliculaire), oculaires (hypertrophie des glandes de Meibomius) et systémiques (asthénie, nausées, anorexie, polynévrite, atteinte hépatique). Le diagnostic peut être confirmé par analyse chimique directe dans les tissus et le sérum(6). Figure 2. Chloracné Indemnisation  Les acnés peuvent être reconnues en maladies professionnelles aux tableaux listés ci-dessous des maladies professionnelles du régime général (RG) ou du régime agricole (RA). Tableau n° 9 RG : dérivés halogénés des hydrocarbures aromatiques. Tableau n° 36 RG et 25 RA : huiles et graisses d’origine minérale ou de synthèse. Messages Le diagnostic d’acné professionnelle nécessite un interrogatoire professionnel rigoureux recherchant les agents responsables. Chloracné : affection rare, due à une intoxication systémique à certains hydrocarbures aromatiques halogénés. 

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