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Acné

Publié le 25 mar 2024Lecture 5 min

Acné et hidradénite suppurée : la physiopathologie pour guider la thérapeutique

Catherine FABER, d’après les communications de N. Dupin (Paris) et A. Villani (Lyon)

Les stratégies thérapeutiques en développement dans l’acné visent spécifiquement chacun des trois facteurs impliqués dans sa physiopathologie. Dans l’hidradénite suppurée, les cibles thérapeutiques innovantes sont aussi définies par une approche physiopathologique.

Parmi les principaux médicaments de l’arsenal thérapeutique actuel de l’acné, seule l’isotrétinoïne agit sur ses quatre composantes physiopathologiques que sont la dysséborrhée, l’hyperkératisation, la dysbiose du microbiote cutané et l’inflammation associée ou non à C. acnes. Aux États-Unis, on a observé entre 2017 et 2020 une augmentation très importante de la prescription de spironolactone (autorisée par la FDA dans l’acné) chez les femmes(1). Celle-ci se fait aux dépens de l’isotrétinoïne. Par ailleurs, face à la montée en puissance de l’antibiorésistance, les recommandations sur les prescriptions d’antibiotiques locaux seuls ou en association avec les antibiotiques oraux ont été modifiées(2).   C. ACNES, INFLAMMATION, SÉBUM   Les innovations thérapeutiques dans l’acné ciblent de façon spécifique C. acnes, l’inflammation en général ou le sébum par des traitements hormonaux ou non hormonaux. Commensal cutané le plus fréquent, C. acnes favorise Staphylococcus epidermidis et diminue la pathogénicité de S. aureus. C’est également un acteur clé pour la fonction de barrière cutanée. Au cours de l’acné, il existe une perte de la diversité globale de C. acnes et une augmentation de la proportion de ses souches pathogènes (phylotypes IA1/IA2). Cette perte de diversité est proinflammatoire. Des travaux de laboratoire ont permis d’identifier des protéines extraites de la membrane de C. acnes reconnues par des ligands, puis de générer des peptides dérivés du facteur de virulence CAMP1 capables de bloquer les interactions entre la bactérie et les cellules cibles via le récepteur TLR-2(3-5). Ils ont montré que les peptides A14, B1 et B2 réduisent la production d’IL-8 induite par C. acnes sans altérer la viabilité cellulaire, et que le peptide B2 réduit l’expression de cytokines inflammatoires in vitro et l’expression de gènes associés à l’inflammation ex vivo. Cet effet bénéfique a sous-tendu l’idée d’un vaccin contre l’acné qui a été testé dans un modèle animal. La vaccination des souris avec des cellules prétraitées par le facteur CAMP a entraîné une diminution du risque d’inflammation(6). Une autre approche thérapeutique ciblant C. acnes est l’utilisation des phages. Dans un modèle murin de lésions acnéiques induites par C. acnes, la phagothérapie topique a permis de diminuer la production de cytokines inflammatoires(7). L’approche anti-inflammatoire repose actuellement sur la méclozine, un antihistaminique H1 dont les propriétés anti-inflammatoires ont été mises en évidence in vivo et ex vivo(8). Cette molécule a été testée dans l’acné sous forme de gel à 2 % versus placebo dans un essai clinique de preuve de concept, avec un taux de satisfaction des patients traités de près de 60 %(8). Dans le domaine des innovations ciblant le sébum, l’olumacostat glasaretil, un inhibiteur de l’acétyl-coenzyme A carboxylase, a montré sa capacité à diminuer la production de sébum dans un modèle animal(9). La production de sébum peut aussi être freinée par des traitements hormonaux comme la clascotérone crème à 1 %(10,11) , un inhibiteur du récepteur androgénique déjà approuvé par la FDA dans l’acné. Le Gata6 qui contribue à l’homéostasie des glandes sébacées et à la physiopathologie de l’acné(12) pourrait être une autre cible potentielle.   VERS UNE MÉDECINE PERSONNALISÉE DANS L’HS?   La physiopathologie de l’hidradénite suppurée (HS) est encore controversée essentiellement du fait de sa grande hétérogénéité clinique. Les études sur cette maladie sont également très hétérogènes dans leurs méthodologies. Leur réalisation se heurte à des obstacles liés à l’absence de modèle murin, in vitro et ex vivo, et de groupe contrôle ainsi qu’à la quasi-absence de cinétique. La dysfonction kératinocytaire, la dysbiose microbienne et une réponse immunitaire « inadaptée » ont été incriminées dans la pathogénie de l’HS. Parmi les facteurs déclencheurs de la maladie figurent l’obésité, dont on sait qu’elle est associée à sa sévérité, le stress mécanique, qui induit une inflammation locale, et un terrain génétique, avec des mutations de gènes de la voie NOTCH.Ces mutations suggèrent qu’il existe un phénomène d’occlusion folliculaire initial du moins chez certains patients(13,14). En ce qui concerne la dysfonction kératinocytaire, il a été montré que les kératinocytes ont un profil pro-inflammatoire et sont hyperproliférants. Sur le plan histologique, la formation de «tendrils» a été décrite récemment(13), mais la présence de ces pseudopodes émergeant à la partie externe du follicule pileux reste à confirmer. D’après certaines données sur la dysbiose microbienne, des bactéries anaérobies interviennent dans la progression de la maladie vers des stades plus tardifs formes pustuleuses(15). Quant à la réponse immunitaire, elle est déclenchée par la rupture du follicule pileux dilaté. La libération de DAMPs (Danger-Associated Molecular Pattern) et de PAMPS (Pathogen Associated Molecular Pattern) active les cellules immunitaires (lymphocytes Th-17 et Th-1, lymphocytes B, neutrophiles) et la sécrétion de cytokines proinflammatoires (TNFα, IL-17 A et F, IL-1β, IL-6) qui induisent la production de chimiokines (CXCL1, CXCL8)(16). L’accumulation périfolliculaire des cellules immunitaires entraîne la formation de nodules, d’abcès et de fistules. Ces données physiopathologiques guident les stratégies thérapeutiques d’aujourd’hui. Une AMM dans l’HS a déjà été attribuée à un anti-TNFα et à un antiIL-17. D’autres molécules sont en développement (anti-IL-1α et 1β, anti-complément C5a, anti-IL-36…). L’analyse transcriptomique de biopsies cutanées a permis d’identifier trois groupes de patients (clusters) avec des signatures moléculaires spécifiques : un cluster «pauci-inflammatoire » proche de la peau saine, avec élévation de l’IL-17F et de l’IL-1A; un cluster « inflammatoire» avec des abcès et surtout des nodules, associé à l’élévation des IL-32, lL-1B, lL-17A et du TNFα ; un cluster «prolifération kératinocytaire» de patients fistuleux, associé à une modulation des gènes de l’autophagie et de l’IL-36(17). L’analyse de ces endotypes moléculaires pourrait conduire vers une médecine personnalisée dans l’HS. Les patients du deuxième cluster sont probablement ceux qui répondent mieux aux biothérapies et, peutêtre, aux combothérapies avec un antibiotique. Chez les patients du troisième cluster, on peut envisager un traitement par des antiproliférants ou éventuellement par des dérivés de la vitamine A. D’après les communications de N. Dupin (Paris) et A. Villani (Lyon). Flash pour la pratique – Acné et hidradénite suppurée : 2 dermatoses en miroir. JDP, décembre 2023

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