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Acné

Publié le 19 déc 2018Lecture 6 min

Que peut le laser dans le traitement de l’acné ?

Gérard TOUBEL, Rennes

L’utilisation des sources laser en dermatologie a connu une expansion importante depuis quelques années avec de très bons succès thérapeutiques. Ce développement s’est fait en multipliant les sources laser et donc en augmentant les indications médicales ou esthétiques de ces dernières avec plus ou moins de bonheur. Il était logique de retrouver ces lasers dans la panoplie des traitements anti-acnéiques, mais sont-ils indispensables ou juste complémentaires comparativement aux thérapeutiques classiques déjà bien évaluées ?

L’acné est une maladie du follicule pilo-sébacé qui touche 85 à 90 % des adolescents. En France, 6 millions de personnes souffrent d’acné ce qui entraîne 5,4 millions de prescriptions médicales. Plus de 30 % des femmes adultes présentent une acné « tardive » plus ou moins entretenue par un profil hormonal particulier ou une contraception non adaptée. L’acné est principalement localisée sur le visage (99 %) mais aussi sur le dos (60 %) et le thorax (15 %) ; on retrouve 10 % de formes graves avec un risque important de cicatrices définitives. Sur le plan thérapeutique, on prescrit des traitements locaux et on y associe des cures d’antibiotiques à petites doses ou de zinc lorsque cette acné devient très inflammatoire et pustuleuse. En dernier recours, on utilisera l’isotrétinoïne par voie orale en cas d’acné résistante, sévère ou nodulokystique. Ce traitement est remarquablement efficace, mais au prix d’effets secondaires non négligeables. La recherche de nouveaux traitements avec moins d’effets secondaires reste un challenge majeur et on a tendance à essayer des techniques lumineuses incluant les lasers. Il ne faut pas oublier non plus que même avec l’arsenal thérapeutique actuel, il existe des acnés résistantes. L’action élective des lasers sur l’acné se fera soit par une réduction de la charge bactérienne de Propionibacterium acnes, soit par la réduction de la taille des glandes sébacées et de la production de sébum. Pour l’action antibactérienne sur P. acnes (qui produit des porphyrines), on utilise les lumières bleues, rouges, pulsées et les lasers vasculaires. On peut admettre qu’il existe peu de preuve concernant leur efficacité si on se réfère aux critères de « la médecine basée sur les preuves » et que ces techniques sont assez peu utilisées. On sait que P. acnes produit naturellement de la coproporphyrine III et de la protoporphyrine IX qui absorbent très bien les UVA (320-400 nm) et la lumière bleue à 451 nm et à un degré moindre la lumière rouge, verte et jaune. Tout cela reste séduisant, mais il n’y a pas beaucoup d’études positives. Une métaanalyse(1) montre une grande hétérogénéité des études avec une inefficacité des lumières vertes et jaunes et une petite amélioration avec la lumière bleue, variable d’un sujet à l’autre, mais avec un taux élevé de récidives à l’arrêt du traitement. Les lumières rouges auraient une petite action anti-inflammatoire mais bien modeste comparativement aux traitements classiques. On trouve même en vente libre des petits appareils à usage domestique, émettant une lumière bleue ou rouge et parfois associée à un spectre infrarouge, qui se vantent de traiter l’acné en se recommandant des principes précédents. Il ne faut pas se leurrer, même en utilisant des longueurs d’onde soi-disant efficaces, on ne réussira pas à améliorer l’acné inflammatoire avec une puissance digne d’une lampe de poche. Pour détruire les glandes sébacées, on utilisera les lasers à infrarouge et la photothérapie dynamique (PDT). Parmi les lasers à infrarouge, on retrouve le Smoothbeam (1 450 nm) et l’Aramis (1 540 nm) qui entraînent une fibrose des glandes sébacées comparable à celle que l’on a avec l’isotrétinoïne, mais plutôt superficielle avec ces lasers. Il existe peu de preuves selon les critères d’« evidence base medicine » vis-à-vis de ces techniques, mais on retrouve quelques publications intéressantes(2) dont deux françaises (J.-M. Mazer, S. Dahan) et de bons résultats cliniques, surtout chez les femmes adultes avec une acné microkystique mandibulaire résistante (figures 1 et 2). Avec la technique de PDT, on applique un produit photosensibilisant pendant 3 heures sur la peau acnéique, puis on irradie cette zone avec une lumière efficace sur ce produit (rouge avec le Metvix®). Figure 1. Résultat à court terme (1 mois après la dernière séance de laser Smoothbeam). Figure 2. Résultat après 4 traitements. On pourra utiliser une période d’incubation plus courte (30 min au lieu de 3 h) pour une acné modérée. Cette technique paraît assez efficace, surtout sur les lésions inflammatoires, mais elle entraîne des effets secondaires assez importants et reste douloureuse. Il ne s’agit donc pas d’un traitement de première intention et on attend des publications sur de larges séries pour confirmer sa place dans notre arsenal thérapeutique. Une métaanalyse(3) critique le suivi très court des publications et trouve les méthodologies critiquables. Les résultats, bien qu’intéressants, restent controversés, sous la responsabilité stricte du médecin, car hors A.M.M., et il faudra peut-être trouver de nouveaux photosensibilisants. On voit donc que la lumière idéale contre l’acné reste à trouver, mais des études sérieuses aux États-Unis(4) se penchent sur une longueur d’onde de 1 708 nm qui détruirait électivement la glande sébacée car elle contient plus de 30 % de lipides, tout en pénétrant profondément (1,6 mm) pour être efficace. D’autres études doivent confirmer cette option et optimiser les paramètres à utiliser. Une nouvelle technique(5) nous a été présentée lors du congrès de l’American Society for Laser Medicine and Surgery (ASLMS) 2015 sous le nom de « Sebacia » qui reprend la technique de photothermolyse sélective ciblée ici sur les glandes sébacées. Elle consiste à appliquer une suspension de microparticules de 0,150 microns, recouvertes par de l’or inerte, suivie de massages énergiques pour activer la pénétration par les orifices de ces glandes sébacées. On nettoie le reste de la suspension non pénétrée puis on irradie avec un laser à diode à 810 nm (LightSheer® 9 x 9 mm 20 à 35 J/cm2) en faisant deux passages à 1 min d’intervalle. On programme 3 sessions séparées de 2 semaines et, d’après cette communication, le comptage des lésions inflammatoires a baissé de 61 % à 28 semaines. Cette année, lors de cette même ASLMS 2017, une étude européenne présentée par Merete Haedersdal (Danemark) utilisant ces paramètres a montré une amélioration de 40 % des lésions au bout de 3 mois chez 78 % des patients et cela sans douleur ni effets secondaires. Une équipe américaine a dû trouver l’or trop cher et a essayé la même technique avec une suspension de particules d’argent et des résultats encourageants à 3 mois. Il faut donc attendre de nouvelles publications avec des séries importantes pour valider cette technique, mais il existe deux points non mis en avant : le prix de ces solutions et le temps passé à faire les massages. Il faudrait aussi évaluer cette technique par rapport aux traitements classiques de l’acné. Une communication de Jérôme Garden de Chicago (non encore publiée), pendant cette ASLMS de 2017, montrait comment traiter l’acné évolutive sur des phototypes 5 et 6 en associant dans la même séance un passage avec le laser Nd;Yag long pulse (60 ms) comme pour l’épilation, puis un balayage avec le laser Nd;Yag Q-switched avec une fluence très faible (1 J/cm2). Les résultats au bout de 18 mois étaient très satisfaisants, sans séquelles, mais au prix de nombreuses sessions (6 à 17). On a aussi vu des études mettant en avant les lasers fractionnés et la radiofréquence fractionnée pour traiter l’acné vulgaire, mais ces études sont peu convaincantes et on va garder ces techniques pour améliorer les cicatrices d’acné. Figure 3. Courbes d’absorption du sébum reconstitué (rouge), de l’eau (bleu) et d’un mélange représentant le contenu d’une glande sébacée (70 % d’eau et 30 % de sébum reconstitué) (noir). Intérêt de la longueur d’onde 1 700 nm.

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