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Photodermatologie

Publié le 07 juil 2022Lecture 8 min

Actualités en photoprotection

Michèle DEKER, Neuilly-sur-Seine - D’après la session « Actualités en photoprotection » avec la participation de C. BEDANE, M.-T. LECCIA et J.-C. BEANI, JDP 2021

La vitamine D est indispensable au maintien de l’homéostasie osseuse et largement dépendante de la photosynthèse. Comment concilier le maintien du statut en vitamine D et la photoprotection cutanée ? Les antioxydants ont-ils fait la preuve d’un bénéfice à cet égard ? Quels critères pour les filtres antisolaires ?

Vitamine D : une étroite dépendance de la photosynthèse Les concentrations de 25(OH)D sériques sont considérées suffisantes pour un niveau > 50 nmol/L, insuffisantes entre 25 et 50 nmol/L et très insuffisantes en deçà de 25 nmol/L pour maintenir une homéostasie osseuse. Les apports alimentaires recommandés en vitamine D sont difficiles à déterminer car ils dépendent de l’exposition solaire ; ils sont évalués à environ 10 μg/j chez l’enfant ou l’adulte, un peu supérieurs chez les femmes enceintes ou allaitantes et les personnes âgées. Il n’y a pas de parallélisme entre le stock de 25(OH)D et la 1,25(OH)2D, sa forme active. Cela dépend de facteurs personnels et externes. Il n’est pas utile de chercher à augmenter les concentrations en vitamine D en faisant du bronzage en cabine. En effet, 90 % de la vitamine D sont produits par photosynthèse dans le spectre des UVB, et non celui des UVA. En pratique, l’apport alimentaire est souvent insuffisant pour compenser le manque d’ensoleillement, ce qui suggère l’intérêt d’une supplémentation à faibles doses de vitamine D en hiver, dans les régions peu ensoleillées. La vitamine D confère une protection contre les dommages induits par les UV responsables des cancers cutanés : augmentation des kératinocytes après exposition aux UV, augmentation de l’expression de p53, diminution du nombre de dimères de thymidine, diminution de la production de NO et de sunburn cells. Le taux de vitamine D sérique est associé à une légère tendance à la protection contre les basocellulaires (> 75 nmol/L) mais ne confère aucune protection à l’égard des carcinomes épidermoïdes. L’exposition solaire est un déterminant majeur du statut en vitamine D, beaucoup plus important que la couleur de la peau. Celle-ci exerce un effet photoprotecteur, de même que les vêtements. La quantité d’UV nécessaires à la synthèse de vitamine D est très faible. Une seule étude avait montré une corrélation inverse entre les antisolaires et le taux de vitamine ; ses résultats n’ont pas été re trouvés dans les travaux ultérieurs. Par conséquent, l’usage normal d’antisolaires ne modifie pas le statut en vitamine D, contrairement à la photoprotection vestimentaire. Les critères pour revendiquer le qualificatif de photoprotection solaire sont : – rémanence et photostabilité ; – photoprotection A et B harmonieuse (CPB/CPA < 3) ; – protection contre les UVA1 (longueur d’onde critique > 370 nm) ; – indice affiché limité à 50+. Il faudrait mettre une quantité d’antisolaire de 2 mg/cm2 de peau environ ; en moyenne, on met 0,8 mg. Les nouveaux antisolaires ont une protection plus équilibrée en UVA, d’où une protection en UVB relativement moindre, ce qui autorise une synthèse plus importante de vitamine D. La vitamine D pourrait avoir une action préventive de l’infection par le SARS-CoV-2 en stimulant la synthèse de peptides antimicrobiens par les monocytes/ macrophages et de cytokines anti-inflammatoires. Des concentrations sériques plus basses de 25(OH)D ont été mises en évidence chez les adultes infectés. La vitamine D module l’activité du système rénine-angiotensine et l’expression de l’ACE2, l’immunité adaptative, d’où son effet sur l’orage cytokinique. De plus, les principaux facteurs de risque de carence en vitamine D sont très semblables à ceux des formes graves de la Covid-19. Des concentrations basses de vitamine D seraient un facteur de risque indépendant de forme grave de la maladie. Les études d’intervention ne sont pas très probantes quant au bénéfice de la supplémentation en vitamine D en cas de Covid-19. Néanmoins, des recommandations européennes récentes préconisent une supplémentation en vitamine D de la population générale, avant toute infection : apport de 1 200 UI/j ou 50 000 UI de vitamine D3 par mois, en doublant la dose chez les sujets obèses. Chez les sujets à risque, les concentrations cibles sont plus élevées (30 à 60 ng/mL) et le dosage de vitamine D est nécessaire. En cas de Covid-19 avéré, il est recommandé une dose de charge de vitamine D au diagnostic : 100 000 UI de vitamine D3 per os (le double chez les sujets obèses), à renouveler après une semaine. Quid des antioxydants en photoprotection ? Avant de prescrire un antioxydant chez les patients ayant des lésions cutanées liées à l’exposition solaire, il est important d’évaluer les apports alimentaires en antioxydants et la prise de compléments alimentaires. En effet, les antioxydants ont un effet pro-oxydant à hautes doses et augmentent le risque de cancer chez les sujets prédisposés. En outre, les normes sont mal connues et les dosages peu reproductibles. L’étude SUVIMAX est la seule étude interventionnelle à large échelle ayant évalué un apport en antioxydants (bêta-carotène, vitamines C et E, sélénium, zinc) ; elle a montré une réduction du risque de mortalité surtout chez les hommes, avec une réduction significative de 31 % des cancers tous sites confondus (p < 0,008), y compris les cancers cutanés, alors que les cancers cutanés étaient augmentés chez les femmes. Plusieurs études antérieures à SUVIMAX avaient montré, chez des patients ayant des facteurs de risque de cancer et des taux d’antioxydants normaux à la base, une augmentation des cancers consécutive à la supplémentation vitaminique et antioxydante. Il n’existe aucune indication à supplémenter les enfants en antioxydants à visée de protection solaire. Au cours d’une journée de soleil, la dose d’UVA reçue est 100 fois supérieure à celle des UVB ; toutes les longueurs d’onde sont impliquées dans les risques liés à l’exposition solaire, y compris dans le visible et l’infrarouge. L’apport d’antioxydants doit être équilibré, au risque d’entraîner un effet inverse à celui recherché. Cela vaut particulièrement pour la superoxyde dismutase (SOD) à ne pas administrer seule. La nutrition apporte les antioxydants qui pourront agir de façon complémentaire et synergique. Les études précliniques montrent certains effets bénéfiques, alors que les études cliniques sont assez décevantes. Les polyphénols – catéchines, génistéine, proanthocyanidines, resvératrol, silymarine/silibinine – ont fait l’objet de plusieurs études sur de petites séries pour évaluer leurs propriétés antiinflammatoires, antioxydantes et réparatrices de l’ADN, par voie topique ou générale. La caféine et caféine benzoate sont de très bons écrans, qui auraient des propriétés anticarcinogènes. Les caroténoïdes (bêta-carotène, lycopène, astaxanthine, etc.) restent très à la mode pour leurs effets aigus provoqués par les UV (coup de soleil). En revanche, la supplémentation orale en bêta-carotène n’a pas montré d’effet préventif des cancers non-mélanomes. Très en vogue actuellement en cosmétologie, le niacinamide est utilisé par voie topique pour contrôler le vieillissement cutané et la pigmentation. Le nicotinamide per os (500 mg x 2/j pendant 1 an) a montré un effet préventif de la récidive des cancers cutanés : diminution très significative et rapide des baso-cellulaires, des carcinomes épidermoïdes et de la kératose actinique ; cet effet est néanmoins uniquement suspensif. Par ailleurs, les vertus de la propolis ont été explorées en association à l’oxyde de titane pour la protection solaire. Certaines plantes sont à la mode, telle l’edelweiss, le pycnogénol. En termes d’alimentation, la cohorte SUVIMAX a montré une association significative entre la consommation d’huile d’olive et la réduction des signes d’héliodermie. La prise de café serait associée à une réduction de 25 % du risque de basocellulaire en cas d’antécédent chez les gros consommateurs de café, mais aucun effet sur le risque des autres cancers. Le chocolat n’a pas montré d’effet photoprotecteur. Enfin, la consommation d’alcool, surtout vin blanc et liqueurs, a été associée à un sur-risque de basocellulaire et de mélanome. L’intérêt se porte aujourd’hui vers le lien entre les apports d’antioxydants et le microbiote cutané et intestinal dans le cadre de la photoprotection. Polémiques sur la protection solaire La meilleure protection solaire reste vestimentaire, mais variable selon le vêtement. Peut-on préparer la peau pour améliorer la photoprotection ? Stimuler la mélanogenèse pour améliorer la pigmentation constitutive ne peut être obtenu par les cabines de bronzage. On parle depuis longtemps des peptides de la MSH, mais sans données prouvant leur efficacité. On a récemment proposé d’intervenir secondairement sur les dommages cutanés ; l’intérêt des enzymes de réparation de l’ADN comme l’endonucléase ou la photolyase extraite à partir de plancton reste à confirmer. La chimioprophylaxie par le nicotinamide poserait des problèmes en traitement au long cours. Les anti-inflammatoires ont montré un effet préventif des cancers, y compris les mélanomes, mais leurs effets secondaires interdisent un usage prolongé. Restent les rétinoïdes per os dans des populations très ciblées pour la prévention des carcinomes spinocellulaires uniquement. La voie du microbiome reste à explorer. Quant à l’alimentation « bio » les études ne sont pas probantes. Restent les filtres solaires, euxmêmes contenus dans un excipient qui conditionne la puissance du produit (concentration maximale en filtres), la quantité appliquée (propriétés d’étalement), la pénétration transcutanée et la rémanence (substantivité). Les filtres appartiennent à deux catégories : chimiques ou organiques, qui absorbent les UV (UVB ou à larges spectres) ; minéraux, qui réfléchissement et diffusent la lumière ; particulaires ou nanoparticulaires. Sont adjoints aux filtres des additifs, susceptibles de provoquer des effets secondaires ou dotés d’effets anti-inflammatoires et par conséquent pouvant faire surévaluer la protection. Peut-on étendre la protection en ajoutant des antioxydants ? Théoriquement oui, mais les antioxydants n’ont pas d’effet protecteur contre les effets du spectre visible ; ils pourraient avoir un effet sur l’héliodermie, à confirmer. Les critères définis pour revendiquer le qualificatif de protection solaire sont définis par les qualités intrinsèques du produit (rémanence, photostabilité) et la photoprotection A et B harmonieuse (CPB/CPA ≤ 3). La mesure de la photoprotection peut être réalisée pour les UVB in vitro sur des volontaires sains ou in vivo. Les tests in vitro sont fondés sur la spectrophotométrie, mais leurs résultats pèchent par manque de reproductibilité, si bien que les méthodes in vivo restent la référence. En revanche, c’est la méthode in vitro qui est utilisée pour qualifier la protection contre les UVA (longueur d’onde critique ≥ 370 nm). Les produits de protection solaire ont une efficacité confirmée dans la prévention du vieillissement cutané, des carcinomes épidermoïdes et des kératoses actiniques ainsi que dans le mélanome, mais pas dans les carcinomes basocellulaires. La protection contre les rayons visibles ne peut être réalisée qu’avec des écrans minéraux, au mieux teintés.

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