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Psoriasis

Publié le 30 mar 2022Lecture 5 min

Nouvelles perspectives de prise en charge du psoriasis

Michèle DEKER, Neuilly-sur-Seine

Les traitements du psoriasis sont passés par de multiples phases, depuis des traitements un peu « barbares » tels que le goudron, puis la corticothérapie locale, la vitamine D et les écoles du psoriasis. Aujourd’hui, nous disposons d’agents thérapeutiques variés et d’outils d’évaluation permettant de quantifier la sévérité de la maladie et l’impact du traitement sur la dermatose et la qualité de vie.

Le dialogue avec le patient est potentiellement riche pour comprendre quelles sont ses attentes : souhaite-t-il parvenir à un PASI 100 ? quelles lésions sont les plus gênantes ? le psoriasis a-t-il un impact sur sa sexualité ? la femme a-t-elle un désir de grossesse ? Autant de questions auxquelles le thérapeute peut apporter une réponse, grâce à une offre de soins élargie. Pour une approche holistique des soins Il est important aujourd’hui d’intégrer le patient dans les objectifs thérapeutiques. Le psoriasis, maladie inflammatoire et chronique, se présente sous plusieurs phénotypes, certaines atteintes étant plus difficiles à traiter : cuir chevelu, paumes et plantes, ongles, plis, zone génitale. L’inflammation systémique est responsable de multiples comorbidités : maladies cardiovasculaires, syndrome métabolique, rhumatisme psoriasique, maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI) et troubles psychologiques. Cette maladie polysystémique nécessite une prise en charge pluridisciplinaire et engendre un lourd fardeau, avec un retentissement majeur sur la qualité de vie. Il est nécessaire d’initier précocement la prise en charge, car un patient sera d’autant moins capable de gérer ses comorbidités que le fardeau de la maladie s’alourdit à long terme. L’étude internationale MAPP a cherché à déterminer quels sont les symptômes les plus gênants de la maladie auprès de 3 426 patients psoriasiques ; ce sont le prurit (43 %), l’hyperkératose (23 %) et la desquamation (20 %), alors que les médecins s’attachent plutôt à gommer les lésions, d’où une possible discordance de prise en charge. Un autre travail a montré que le DLQI n’est sans doute pas suffisant pour évaluer la qualité de vie. Il est donc nécessaire pour les dermatologues d’avoir une écoute active et de questionner les patients sur leurs attentes réelles afin d’adapter le traitement si nécessaire. Une étude internationale (11 pays européens) a caractérisé le vécu des femmes psoriasiques en âge de procréer ; dans près des deux tiers des cas, les patientes se sentent stigmatisées, cherchent à cacher leur psoriasis, se limitent dans leur vie sociale et amicale ; elles se sentent en danger au niveau professionnel, parfois discriminées, parfois moins bien rémunérées que leurs collègues, et certaines estiment avoir moins de perspectives d’évolution professionnelle ; parfois, elles se refusent à construire une vie familiale, se sentent incapables de s’occuper de leurs enfants, peut-être de crainte de transmettre leur maladie. La prise en charge du psoriasis doit donc être globale, et inclure un soutien psychologique des individus. L’étude POSITIVE, observationnelle prospective dans un contexte de vraie vie, va étudier la qualité de vie générale et psychologique des patients atteints de psoriasis traités par tildrakizumab. L’autoquestionnaire utilisé comportera 5 questions évaluant le bien-être général et psychologique ; il sera complété par une évaluation du bénéfice à long terme du traitement, de la satisfaction des médecins et de l’impact du psoriasis sur les partenaires des patients. Rhumatisme psoriasique : pour une stratégie optimisée Le rhumatisme psoriasique comporte deux volets : articulaire et extra-articulaire. Les atteintes articulaires peuvent être périphériques et/ou axiales, parfois enthésitiques. Toutefois, la co-existence d’un psoriasis et d’une arthropathie inflammatoire ne signe pas obligatoirement la nature psoriasique du rhumatisme. Depuis la découverte des nouveaux traitements biologiques spécifiques, il est devenu important de bien préciser le diagnostic. Le rhumatisme psoriasique est une maladie sévère ou très sévère dans 20 % des cas : à 2 ans, 47 % des patients ont au moins une érosion ; à 10 ans, plus de 50 % ont au moins cinq articulations déformées. Le fardeau psycho-social de la maladie est majeur et souvent sous-estimé. Le rhumatisme psoriasique associe un mélange d’ostéite, érosions, enthésites (inflammation de la zone d’insertion du tendon dans l’os), arthrite et atteinte cutanée. Parmi les multiples acteurs impliqués dans sa physiopathologie, l’IL-23 tient une place prééminente, en intervenant très précocement au niveau de la peau, du tube digestif et des sites articulaires. Les trois cytokines principalement impliquées sont IL-23, IL-17 et IL-22. Le tildrakizumab, inhibiteur de l’IL-23, a été évalué dans le rhumatisme psoriasique dans un essai international de phase 2 b randomisé en double insu versus placebo de 52 semaines avec pour critère de jugement principal le taux de réponse ACR20 à la semaine 24 (Mease PJ et coll. Ann Rheum dis 2021 ; 80 : 1147-57). Les trois doses de tildrakizumab (200 mg/4 sem ; 200 mg/12 sem ; 100 mg/12 sem) sont rapidement efficaces : 70 à 80 % des patients traités par tildrakizumab obtiennent une réponse ACR 20 à la semaine 24, avec des taux de réponse maintenus jusqu’à 52 semaines; 17 à 28 % présentent une réponse ACR 70 à la semaine 24, avec des taux en augmentation jusqu’à la semaine 52. Les scores d’évaluation des enthésites sont également nettement améliorés, de même que les dactylites. La tolérance de cet immunomodulateur spécifique est excellente, d’où un grand intérêt en termes de bénéfice/risque. Le syndrome métabolique impacte peu l’efficacité de cette biothérapie. Anti-IL-23 pour contrôler le psoriasis au long cours ? Plusieurs anti-IL-23 sont déjà disponibles pour traiter le psoriasis : guselkumab, risankizumab et tildrakizumab (par ordre d’entrée sur le marché pharmaceutique). Dans l’étude VOYAGE qui évaluait le guselkumab à 5 ans, des patients « difficiles » ont été sélectionnés (tabagisme, arthrite psoriasique, traitements antérieurs), les réponses IGA 0/1 et PASI 90 ont généralement été maintenues dans tous les sous-groupes jusqu’à 5 ans de traitement (75 à 80 % de maintien en moyenne). Concernant le risankizumab, dans l’étude d’extension en ouvert à 3 ans LIMMitless, le taux de réponse PASI 90 est maintenu. Dans les études reSURFACE 1 et 2 évaluant le tildrakizumab avec un suivi à 5 ans, le PASI absolu est maintenu avec les deux doses du produit (seule la faible dose a été retenue par les autorités sanitaires). En outre, ces études ont montré une amélioration de la productivité au travail (ou aux études) dès après la 2e injection chez les patients rapportant des difficultés en raison de leur dermatose. Nous disposons également d’études en vraie vie concernant le guselkumab à 16 semaines, le risankizumab à 24 semaines et le tildrakizumab à 28 semaines, lesquelles confirment les données des études contrôlées et la bonne tolérance de ces molécules. Au total, les trois anti-IL-23 ont bien démontré, dans les études d’extension comme dans la vraie vie, leur efficacité, leur excellent maintien, ce qui les démarque des anti-TNF en raison de l’immunogénicité de ceux-ci, et des anti-IL-17 dont la perte d’efficacité est plus importante. Les anti-IL-23 représentent un véritable saut conceptuel avec le blocage d’une cytokine très précoce dans la boucle inflammatoire du psoriasis, ce qui explique peut-être le bon maintien à long terme. Ils sont très peu immunogènes, très bien tolérés et sans doute capables d’induire des rémissions prolongées.

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