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Cas cliniques

Publié le 10 oct 2010Lecture 4 min

Une lésion nodulaire du pouce

M. RMILI, K. EL HAMDOUCHI, B. HASSAM Service de dermatologie, hôpital Ibn Sina, Rabat, Maroc

Un homme de 40 ans, sans antécédents, présentait depuis un mois une lésion nodulaire érythémateuse du repli sus-unguéal du pouce droit, non inflammatoire, devenant progressivement érythémato-violacée et croûteuse, apparue 15 jours après la fête du mouton « Aïd el kebir ».

L’anamnèse retrouve la notion de plaie au même endroit par un couteau souillé ayant servi à égorger le mouton. Le reste de l’examen est sans particularités. Le patient a bénéficié d’un traitement symptomatique à base d’antiseptiques locaux. L’évolution a été marquée par la disparition du nodule après une dizaine de jours. Pouce droit : lésion nodulaire érythémateuse. Quel est votre diagnostic ? Commentaire Le diagnostic de nodule d’Orf a été retenu devant les données anamnestiques, cliniques et évolutives. • Le terme d’Orf est utilisé par les bergers irlandais pour désigner la dermatite pustuleuse contagieuse ovine. Il s’agit d’une zoonose virale due à un parapoxvirus, le molluscipoxvirus, de la famille des poxviridae et sous-famille des chordopoxvirinae, virus à ADN résistant à la chaleur et au froid, pouvant survivre plusieurs années sur le sol et les objets souillés. • Épidémiologie. Chez les ovins et les caprins infectés, l’infection se traduit le plus souvent par des ulcérations péribuccales et périnasales, mais parfois aussi par une éruption pustuleuse généralisée. • L’infection se voit surtout en milieu rural. La transmission à l’homme se fait par contact direct avec l’animal dans certaines professions à risque (éleveurs, vétérinaires, bouchers, ouvriers de la chaîne de réfrigération), dans certaines circonstances comme à l’occasion de la fête du mouton « Aïd el kebir », mais aussi par contact avec les objets souillés (couteaux, instruments de tonte, serviettes, etc.). La contamination interhumaine est possible, expliquant la présence de cas familiaux. L’infection confère une immunité de brève durée d’où la possibilité de contamination. • Diagnostic clinique. Dans les formes typiques, le tableau se résume à une lésion cutanée asymptomatique, unique sur la zone d’inoculation, en particulier les doigts et l’avant-bras droits(1). Après un temps d’incubation d’une semaine en moyenne, apparaît une lésion maculeuse qui devient rapidement papulovésiculeuse, puis nodulaire, entourée par un halo inflammatoire réalisant un aspect en cible. À la phase tardive, la lésion devient papillomateuse, puis croûteuse, avant de disparaître sans laisser de cicatrices en 4 à 6 semaines en moyenne. Des formes trompeuses peuvent se voir : botriomycoïdes, angiomateuses ou à type de kératoacanthome. Les lésions peuvent prendre un aspect volumineux et végétant chez l’immunodéprimé. Le diagnostic positif de l’Orf repose essentiellement sur l’anamnèse et sur l’examen clinique(1). • Dans certains cas douteux, l’examen histologique peut être utile. Sur une lésion récente, les images histologiques caractéristiques de l’Orf sont : une spongiose épidermique, une vacuolisation cytoplasmique des kératinocytes, une invagination en doigts de gants de l’épiderme dans le derme, infiltrat lymphohistiocytaire et prolifération vasculaire massive dans le derme. La microscopie électronique, à laquelle on a exceptionnellement recours en pratique, confirme le diagnostic en mettant en évidence dans le cytoplasme des kératinocytes les particules virales caractérisées par leur aspect ovoïde et strié. • La complication la plus fréquente de l’Orf est la surinfection bactérienne à staphylocoque doré ou streptocoque. Parfois, une éruption cutanée à distance peut se voir, à type de lésions vésiculeuses diffuses ou d’érythème polymorphe, qui apparaît généralement 10 à 14 jours après l’apparition de l’Orf et disparaît en une semaine en moyenne. Dans la majorité des cas, il s’agit d’une forme modérée, sans atteinte muqueuse ni altération de l’état général(2,3). Quelques cas de pemphigoïde généralisée secondaire à un Orf ont été rapportés. • Parmi les diagnostics différentiels, il faut éliminer les autres pathologies à parapoxvirus (nodule des trayeurs, Molluscum contagiosum), ou une pyodermite végétante, une trichophytie nodulaire, une tuberculose végétante et verruqueuse, ou un mélanome. • Traitement. Du fait de sa bénignité, de son caractère limité et spontanément résolutif, l’Orf ne nécessite aucun traitement spécifique. Une antisepsie locale est prescrite pour éviter la surinfection, et des antibiotiques en cas de greffe bactérienne. Une exérèse chirurgicale ou une cryothérapie peuvent être proposées pour les cas récidivants ou de résolution tardive. • La prévention repose sur la vaccination des ovins et des caprins (vaccins onéreux), l’isolement des animaux malades et la sensibilisation des sujets professionnellement exposés au port de gants lors de la manipulation des carcasses, surtout la tête, de ces animaux.

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