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Cas cliniques

Publié le 07 jan 2020Lecture 6 min

La tuberculose cutanée, toujours un problème d’actualité – Ne pas méconnaître les formes cliniques

O. BOUDGHENE STAMBOULI, Algérie
La tuberculose cutanée, toujours un problème d’actualité – Ne pas méconnaître les formes cliniques

En 1980, dans un climat de triomphalisme médical, les maladies transmissibles ne devaient plus faire parler d’elles.
Or, quelques mois plus tard, soudainement, émergeait un syndrome inconnu lié à une immunodéficience acquise, le SIDA, qui en 25 ans a emporté 25 millions d’êtres humains. Dans les pays d’Afrique, en particulier l’Algérie, la tuberculose cutanée sévit à l’état endémique et est l’affection la plus fréquente des mycobactérioses.

QUELQUES DONNÉES ÉPIDÉMIOLOGIQUES Depuis 1981 à 1995, nous avons notifié et suivi régulièrement 90 cas, avec une moyenne de 6 cas par an. Les deux sexes étaient également représentés (1). Plus de 65 % des cas avaient moins de 40 ans et seulement 20 % des sujets étaient vaccinés par le BCG. Par contre, l’IDR à la tuberculine était fortement positive dans 86 % des cas. Répartition de fréquence des aspects cliniques de la tuberculose cutanée Service de dermatologie, CHU Tlemcen Algérie, 1981-1995 (tableau et figures 1, 2, 3 et 4) OBSERVATIONS CLINIQUES RÉCENTES ET FORMES RARES ET INHABITUELLES Tuberculose palatine : une localisation rare à ne pas méconnaître Une résurgence de la tuberculose, notamment au profit des formes extra-pulmonaires, est signalée depuis une dizaine d’années dans les pays du Maghreb. Nous rapportons une observation de tuberculose palatine chez une femme immunocompétente dont le diagnostic était retardé de plusieurs mois. • Observation Une femme de 27 ans nous a été orientée pour des érosions douloureuses du palais évoluant depuis 9 mois(2). L’examen retrouvait des érosions superficielles jaunâtres reposant sur un fond érythémateux. Des adénopathies cervicales sont apparues secondairement. La patiente rapportait une dysphagie, un amaigrissement de 11 kg en 9 mois et une asthénie. L’interrogatoire retrouva la notion de contage tuberculeux. L’IDRT était positive et l’examen direct à la recherche de BK était négatif. Une première biopsie muqueuse n’était pas concluante, puis une deuxième série de biopsies muqueuses confirmait le diagnostic de tuberculose en mettant en évidence le granulome épithélioïde giganto-cellulaire avec nécrose caséeuse. L’ensemble des bilans à la recherche d’une tuberculose viscérale active ainsi que la recherche d’une immunodépression associée notamment une sérologie HIV étaient négatifs. La patiente était traitée avec succès par thérapie antituberculeuse. Abcès sous-cutané de la paroi thoracique et de l’avant-bras droit : forme exceptionnelle de tuberculose La localisation pariétale thoracique est une forme très rare de la tuberculose. Évaluée à 15 % des tuberculoses extra-pulmonaires. Il s’agit d’une forme exceptionnelle, le plus souvent décrite chez l’immunodéprimé. Elle pose souvent un problème diagnostique avec les autres infections à pyogènes ou à actinomycètes. Nous rapportons un cas d’un abcès pariétal thoracique avec deuxième localisation au niveau de l’avant-bras droit. • Observation Un homme de 36 ans (figures 5 et 6) présentait depuis 1 an une tuméfaction préthoracique gauche de 10 cm de grand axe suivie, quelques mois après, d’une autre localisation de l’avant-bras droit mesurant 7 cm avec fièvre, toux asthénie et amaigrissement. Le bilan biologique retrouvait une hyperleucocytose avec VS à 32 mm et une IDRT phlycténulaire à 22 mm, la sérologie hydatique était négative, la recherche des BK dans les crachats et les urines était négative et la radiographie thoracique objectivait une pleurésie gauche sans anomalies parenchymateuses ou osseuses associées. L’examen tomodensitométrique montrait de nombreuses masses de densités hétérogènes spléniques, hépatiques avec adénopathies hilaires sans atteinte osseuse ni pulmonaire parenchymateuse. La cytoponction confirmait le diagnostic d’abcès froid tuberculeux avec mise en évidence d’un fond sale éosinophile grumeleux correspondant à la nécrose caséeuse et le patient a été mis sous quadruple antituberculeux avec évacuation des abcès sous-cutanés. Le patient a été revu 3 mois après le début du traitement avec régression de la taille des abcès et amélioration de l’état général. La tuberculose cutanée : toujours un problème d’actualité et de santé publique en Algérie, à propos de 7 observations récentes La tuberculose cutanée et extra-cutanée connaît une recrudescence ces dernières années ; non seulement dans les pays en voie de développement, mais également dans les pays développés. Nous rapportons sept cas de tuberculoses cutanées observées dans notre service de juillet 2011 à mai 2012(3). • Observation Il s’agit de sept cas de tuberculose cutanée : trois lupus tuberculeux, deux gommes, un scrofuloderme et un érythème induré de Bazin. Le sexe féminin était retrouvé dans six cas sur sept ; la vaccination était positive dans cinq cas sur sept, avec cicatrice de vaccination positive chez trois patients. Les intradermoréactions à la tuberculine étaient toutes positives, avec deux cas phlycténulaires, elle n’a pas été réalisée chez une patiente chez qui le bacille de Koch était positif. DISCUSSION Première discussion : tuberculose palatine La tuberculose de la cavité buccale est une entité rare, représentant moins de 1 % de l’ensemble des cas de tuberculose. Outre le palais, les autres localisations comprennent la langue, les gencives et les lèvres. Elle fait suite généralement à une auto-inoculation à partir d’un foyer pulmonaire, laryngé ou digestif. L’observation est originale du fait de la localisation palatine de la tuberculose qui constitue une entité très rare et de sa sur - venue chez un sujet adulte en absence d’immunodépression associée ou de foyer tuberculeux profond. Conclusion • La tuberculose buccale reste de diagnostic difficile étant donné sa rareté et son grand polymorphisme lésionnel. • Elle devrait être évoquée devant toute ulcération buccale chronique ne répondant pas aux traitements usuels, surtout chez un sujet vivant dans une zone d’endémie tuberculeuse. Deuxième discussion : abcès sous-cutané de la paroi thoracique et de l’avant-bras droit : forme exceptionnelle de tuberculose La tuberculose de la paroi thoracique est une affection très rare 0,1 % de toutes les formes de tuberculose. L’atteinte pariétale est souvent due à une dissémination hématogène d’un foyer pulmonaire, une inoculation directe, une extension d’une adénite de la paroi thoracique ou à un drainage lymphatique d’une plèvre infectée. Un antécédent de tuberculose est retrouvé dans 83 % des cas et une tuberculose active concomitante est retrouvée dans 17 % des cas. L’abcès froid se localise le plus souvent au niveau de la paroi antérolatérale du thorax. La masse est peu fluctuante, ce qui n’évoque que rarement une origine infectieuse. Notre patient présentait une double localisation pré-thoracique gauche et une autre au niveau de l’avant-bras droit avec toux, fièvre, sueurs nocturnes et amaigrissement. Le diagnostic de tuberculose pariétale reste difficile à l’imagerie du fait de l’absence de signes spécifiques. Ce dernier repose sur l’isolement du mycobacterium tuberculosis dans le liquide de ponction ou sur l’étude anatomopathologique des biopsies. L’association chirurgie traitement médical est préconisée. Troisième discussion : la tuberculose cutanée, toujours un problème d’actualité et de santé publique en Algérie, à propos de 7 observations récentes Le bacille de Koch n’a été retrouvé que dans un seul cas (gomme tuberculeuse, la patiente était diabétique). Les localisations extra-cutanées n’ont été trouvées que dans deux cas (scrofuloderme et gomme tuberculeuse). La notion de contage était trouvée dans deux cas. Les patients ont été mis soit sous triple ou quadruple antituberculeux avec évolution très favorable, mis à part un cas décédé (gomme tuberculeuse) à la suite d’un trouble du rythme cardiaque (antécédent de cardiopathie ischémique). En moins d’une année, 7 cas de tuberculoses cutanées ont été observés. La tuberculose est toujours d’actualité et pose un problème de santé publique, car elle touche toutes les catégories de la population en Algérie. • Conclusion • Nous observons ces dernières années une recrudescence de la tuberculose cutanée, un diagnostic plus précoce, un traitement bien conduit, un dépistage de masse et une meilleure disponibilité des antituberculeux permettra d’en réduire considérablement les cas. DISCUSSION GÉNÉRALE Les aspects cliniques les plus fréquemment rencontrés sont le lupus vulgaire et le scrofuloderme. La tuberculose n’est pas une pathologie en voie d’extinction dans les pays maghrébins(4,5) , elle garde toujours les aspects cliniques décrits dans les grands traités de dermatologie(6) des formes historiques sont toujours décrites(7,8). L’IDR à la tuberculine lorsqu’elle est fortement positive est d’une grande aide. • Conclusion • Il est inutile d’insister sur l’importance des examens histologiques et bactériologiques qui minimisent la part du recours au traitement d’épreuve. Une atteinte extracutanée doit être toujours recherchée. Une pathologie controversée par certains à un regain d’actualité, en l’occurrence les tuberculides c’est-à-dire les manifestations cutanées stériles accompagnant un foyer tuberculeux viscéral évolutif(5,6,7). Ces manifestations sont fréquemment décrites dans les pays occidentaux(5,7,9).

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