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Cas cliniques

Publié le 01 juil 2020Lecture 4 min

La sclérose tubéreuse de Bourneville

Omar BOUDGHENE STAMBOULI, CHU Tlemcen, Algérie

La sclérose tubéreuse de Bourneville ou épiloïa (epilepsy, low intelligence, adenoma sebaceum) est une neurocristopathie rare, environ 1/100 000 naissances par rapport à la neurofibromatose de Von Recklinghausen, 1/3 000 naissances. Le dépistage des signes cutanés est essentiel ; un diagnostic précoce est indispensable afin d’éviter l’évolution vers une détérioration mentale.

Nous en rapportons trois cas d’épiloïa chez une même famille. Cas 1 Mme B. Amaria, mère de 7 enfants, sans antécédents particuliers, consulte pour des angiofibromes centrofaciaux (figure 1) dont les premiers remontent à l’enfance. Deux de ses enfants ont une symptomatologie similaire. Figure 1. Angiofibromes centrofaciaux. L’examen permet de retrouver une multitude de petites élevures globuleuses de 2 à 5 mm de diamètre, de consistance ferme, lisses, de teinte différente de celle de la peau normale ou rouge, isolées ou groupées en plaques à relief irrégulier, particulièrement dans la région centrofaciale : sillons nasogéniens, sillon mentonnier, joues et menton. Sur la nuque et les aisselles, on retrouve plusieurs petites formations pédiculées, flasques brunâtres, évocatrices du mollusca pendula. Sur le tronc est notée aussi une tache café au lait. Au pied droit, une syndactylie intéresse le 4e espace ; sur le bord latéral externe du 5e ongle, il existe une formation allongée, pédiculée, sombre, à sommet kératosique évoquant une tumeur de Koenen (figure 2). • Les bilans ophtalmologique, cardiovasculaire, neurologique (+EEG), radiologique, osseux et biologique sont sans particularités. • L’échographie abdominopelvienne révèle plusieurs kystes rénaux ainsi qu’un petit angiome hépatique de 10 mm de diamètre sur le segment VIII. Figure 2. Tumeur de Koenen. Cas 2   B. Nadia, âgée de 17 ans et fille de Amaria, présente depuis l’âge de 6 ans des angiofibromes, moins nombreux mais plus concentrés sur la région centrofaciale. Les mollusca pendula sont un peu plus marqués sur la nuque et les aisselles et siègent sur une peau brune d’aspect sale. Sur le tronc, quelques taches achromiques sont présentes mais on ne retrouve pas de tumeurs de Koenen. Au niveau de la région sa crée ainsi qu’au niveau interfessier, elle a des hamartomes collagènes à type de plaques épaisses élastiques bosselées prenant l’aspect de peau de chagrin (figure 3). • Les examens ophtalmologiques, cardiovasculaire, radiologique et biologique sont sans particularités. • L’EEG révèle une notion de crise partielle de type moteur, survenant rarement depuis l’âge de 10 ans avec un tracé en faveur d’une comitialité. L’échographie abdominopelvienne montre plusieurs kystes du rein droit et un angiome hépatique de 6 mm de diamètre sur le segment VI. Figure 3. L’aspect de peau de chagrin. Cas 3 B. Ahmed, 14 ans, présente des angiofibromes profus depuis l’âge de 4 ans et des mollusca pendula sur la nuque. Il n’est pas noté de modifications dyschromiques ou de tumeur de Koenen. Le bilan général est strictement normal, de même que l’échographie abdominopelvienne. Sur le plan psychomoteur, cet enfant a eu un développement normal jusqu’à 1 an. Depuis, il a eu des crises cloniques généralisées. À partir de 10 ans sont apparus les troubles du langage marquant l’aggravation de la démentification. • L’EEG montre des anomalies en faveur d’une souffrance cérébrale. • L’examen tomodensitométrique cérébral révèle des calcifications périventriculaires sous-épendymaires en regard du carrefour ventriculaire gauche, de la paroi latérale du ventricule gauche et du toit des deux ventricules latéraux associés à de discrets signes d’atrophie cérébrale corticale. De même est noté un kyste arachnoïdien médian rétrocérébelleux. Discussion  Cette observation familiale illustrative d’épiloïa est intéressante à cause du tableau clinique très classique et des découvertes qui ont été faites. Sur le plan dermatologique Les principaux signes sont retrouvés. En 1989, dans leur étude sur la sclérose tubéreuse chez l’enfant dans l’ouest algérien, Chalabi Benabdellah et coll.(1) ont noté des signes cutanéomuqueux chez 95 % des cas (21/22) étudiés ; les taches achromiques représentent 71 % des cas (17/22) et les angiofibromes 37,5 % des cas (9/22) (figure 1). La tache café au lait présente chez la patiente du cas 1 n’a peut-être pas de signification dans la mesure où selon certains auteurs, ce signe existe dans à peu près la même proportion chez des malades que dans une population témoin(1). La syndactylie pourrait être plus significative car elle concerne un orteil sur lequel s’est développée une tumeur de Koenen. Cependant, ce signe nous paraît inhabituel dans cette neurocristopathie. Un bilan radiologique osseux normal Il reste cependant nécessaire, car il existe des cas où la symptomatologie osseuse est prédominante. Ainsi, Naert et coll.(2) ont éliminé la possibilité de métastases osseuses ostéocondensantes évoquées sur des images de foyers d’hyperostose disséminée du rachis. La découverte de tumeurs de Koenen (figure 2) et de mollusca pendula leur a permis de redresser ainsi le diagnostic. Nous insistons donc sur l’examen cutané minutieux et particulièrement sur les mollusca pendula, signe moins évocateur(3) mais qui peut être négligé. Le bilan viscéral a une grande importance dans la mesure ou des kystes rénaux et des formations évoquant des angiomes hépatiques ont été découverts chez deux de nos patients. Les signes neuropsychiatriques(4) représentent un motif fréquent de consultation et particulièrement les crises épileptiques(3), imposant la nécessité d’une prise en charge précoce afin d’éviter l’évolution vers des détériorations mentales comme malheureusement dans le cas 3. Conclusion • Le conseil génétique est difficile du fait de la grande variabilité phénotypique. La fréquence et l’importance du retentissement neurologique doivent être soulignés d’ailleurs à cause de la fréquence des mutations (70 %)(3). Si 90 % des patients adultes atteints d’épiloïa présentent des signes dermatologiques très évocateurs du diagnostic, en revanche, chez l’enfant le diagnostic sera peut-être plus difficile du fait de symptômes cliniques très discrets. Chez l’enfant, un examen clinique approfondi ainsi que des membres de la famille du premier degré (le plus possible) avec des investigations multiples pour réunir les critères nécessaires (imagerie cérébrale, EEG, échographie rénale, etc.) s’impose.

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