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Dermatologie générale

Publié le 25 oct 2023Lecture 4 min

N’ayons pas peur de la cirrhose

Flavien DAUTRECQUE, Service de gastro-entérologie, centre hospitalier de Lens

La cirrhose est le stade ultime d’une hépatopathie chronique fibrosante, quelle que soit son étiologie.

Nous utilisons la classification Métavir pour en décrire l’évolution : – fibrose F0 : absence de fibrose, avec présence ou non de stéatose (accumulation intra-hépatocytaire de graisses) ; – fibrose F1 : fibrose portale sans septum fibreux ; – fibrose F2 : fibrose portale avec rares septa fibreux ; – fibrose F3 : fibrose portale avec nombreux septa fibreux ; – fibrose F4 : fibrose annulaire avec nodules de régénération, synonyme de cirrhose. Une hépatopathie chronique est dite « non avancée » en cas de stéatose sans fibrose, de fibrose F1 ou F2. Elle est dite « avancée » en cas de fibrose F3 ou F4 (cirrhose), stades à partir desquels le risque de carcinome hépatocellulaire est majoré et justifie un dépistage semestriel par imagerie.   MÉTHOTREXATE ET FIBROSE HÉPATIQUE   En 2008, Dermatologie Pratique publiait un article intitulé « Hépatotoxicité du méthotrexate »(1), où déjà le potentiel fibrosant de ce médicament était remis en question. La conclsion était que la fibrose hépatique imputée à cette molécule était probablement secondaire à des facteurs de risque hépatique non pris en compte dans les premières études, tels que l’hépatite C ou le syndrome dysmétabolique. D’autres études sont parues au cours des quinze dernières années, et plusieurs confirment l’absence de lien entre méthotrexate et apparition d’une fibrose hépatique. La métaanalyse de Yongpisarn et coll.(2) parue en 2022 va en ce sens. Les patients atteints de psoriasis ont une prévalence de fibrose hépatique estimée à 10 %, mais uniquement du fait de leurs comorbidités telles que le syndrome dysmétabolique ou la consommation excessive d’alcool. Les recommandations françaises de dermatologie suggèrent pourtant toujours, dans la dernière version de 2018(3), la réalisation systématique d’une échographie hépatique avant de commencer un traitement par méthotrexate et d’une élastométrie chez les patients obèses. Au cours du traitement, l’élastométrie peut être répétée tous les 1 ou 2 ans, et le procollagène III tous les 6 à 12 mois. Les recommandations du GETAID (Groupe d’étude thérapeutique des affections inflammatoires du tube digestif) proposent, elles, un simple bilan hépatique sanguin préthérapeutique avant introduction de méthotrexate pour le traitement d’une maladie inflammatoire chronique intestinale (MICI). L’expérience et l’accumulation d’études récentes doivent en effet rassurer tous les praticiens prescrivant du méthotrexate sur le risque de fibrose hépatique. La réalisation d’une échographie abdominale préthérapeutique ou d’une élastométrie avant ou au cours du traitement semble ainsi inutile chez un patient sans facteur de risque d’hépatopathie. À l’inverse, sa prescription reste l’occasion pour tout praticien de s’interroger sur une fibrose préexistante : – en cas d’obésité, de diabète, de consommation excessive d’alcool, d’anomalie du bilan hépatique initial, d’une hépatite B ou C guérie, l’organisation d’une élastométrie est légitime ; – la découverte d’une infection virale B ou C active doit faire prendre contact directement avec un hépatologue pour discuter d’un traitement antiviral et de la possibilité d’introduction de l’immunosuppresseur. L’élastométrie est supérieure à l’échographie pour le diagnostic de la fibrose hépatique, notamment débutante. Il s’agit d’une méthode ultrasonographique qui ne permet pas de visualiser le parenchyme hépatique mais de mesurer son élasticité, corrélée au stade de fibrose. En cas d’hépatopathie non avancée (stéatose, fibrose F1 ou F2), seule la prise en charge du facteur de risque identifié est nécessaire, et un suivi hépatologique n’est pas recommandé. En cas d’hépatopathie avancée, un dépistage semestriel du cancer du foie est également proposé.   MÉDICAMENTS ET CIRRHOSE   Des essais ont eu lieu afin d’inventer l’équivalent hépatique du débit de filtration glomérulaire qui permet en cas d’insuffisance rénale d’adapter facilement une posologie médicamenteuse. Sans succès. L’appréciation de la fonction hépatique repose donc sur l’existence de signes de décompensation clinique ou biologique de la cirrhose. Une cirrhose est dite « compensée » en l’absence d’ascite, d’encéphalopathie, de baisse du TP inférieure à 50 % ou d’hyperbilirubinémie supérieure à 20 mg/L (ou 35 µmol/L). Il peut cependant exister une cytolyse ou une cholestase, témoins de l’existence de la fibrose ou de l’inflammation hépatique. À ce stade (comme aux stades antérieurs de fibrose ou de stéatose), il n’existe aucune restriction médicamenteuse et aucune adaptation posologique. Le paracétamol est notamment encore souvent contre-indiqué par de nombreux médecins. À l’inverse, en présence d’une cirrhose décompensée, et selon la sévérité de la décompensation, il peut être risqué d’introduire certaines thérapeutiques (dont le Méthotrexate), ou des adaptations posologiques peuvent être justifiées. Une discussion avec l’hépatologue du patient pour juger du rapport bénéfice-risque semble utile, notamment avant prescription de certaines classes médicamenteuses comme les immunosuppresseurs ou les biothérapies.

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