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Génodermatoses

Publié le 13 déc 2022Lecture 4 min

Ichtyoses congénitales : mieux comprises et mieux traitées

Denise CARO, d’après la communication de Nathalia Lucia Bellon, Hôpital Necker-Enfants malades, Paris, SDPHN 2022

Les ichtyoses congénitales font partie des troubles de la kératinisation. En fonction des mutations et des protéines impliquées, leur expression phénotypique et la sévérité de l’atteinte varient(1). Plusieurs publications récentes font état d’avancées physiopathologiques et thérapeutiques permettant d’améliorer la prise en charge des patients.

Les ichtyoses sont des maladies hétérogènes qui entraînent un degré variable d’hyperkératose, d’épaississement cutané, de desquamation et d’inflammation. Il existe différentes formes d’ichtyoses : ichtyose vulgaire, ichtyose lamellaire, érythrodermie ichtyosiforme congénitale, ichtyose arlequin, etc. Elles sont classées en formes syndromiques et non syndromiques, selon que d’autres organes que la peau sont touchés ou non.Le diagnostic repose sur les biopsies cutanées avec immuno-marquage. Le syndrome de Netherton est associé à l’absence d’expression de la protéine LEKTI(2) ; les ichtyoses par mutation du gène codant pour la transglutaminase-1 (TGM1) sont caractérisées par une diminution ou l’absence de marquage TGM1. L’immuno-marquage est également utile en cas de maladies desmosomales. En revanche, au cours d’une ichtyose liée à l’X ou d’autres ichtyoses rares, la recherche sur un prélèvement de sang (par un laboratoire spécialisé) d’un déficit enzymatique en arylsulfatase C ou en stéroïde sulfatase est utile pour confirmer le diagnostic(1). Par ailleurs, le diagnostic moléculaire et l’accès aux séquençages d’exomes (voire du génome) permettent de confirmer la ou les mutations causales. Cette étape est essentielle pour proposer un conseil génétique, pour adapter le traitement et éventuellement pour dépister des complications. L’augmentation du nombre de séquençages chez les patients suivis pour ichtyoses a fait progresser la compréhension des mécanismes physiopathologiques selon des protéines impliquées.   Corrélations génotype/phénotype Plusieurs publications récentes concernent la mutation de gènes impliqués dans les érythro -kératodermies comme les gènes GJA1/connexine 43, KDSR (+/- associée à􀀀 une thrombopénie) ou PERP (associée à un phénotype cutané de maladie desmosomale avec des anomalies pilaires et une kératodermie plantaire)(3-5). Une autre a montré que des lésions d’érythro-kératodermie peuvent être un des symptômes d’ichtyose, sans pour autant constituer un phénotype à part entière. Par exemple, au cours d’ichtyoses par mutations ABCA 12, NIPAL 4 ou PNPLA 1, une érythrodermie est possible mais pas systématique(6). Des progrès ont également été faits concernant les corrélations génotype/phénotype. Au cours d’une ichtyose TGM1, on retrouve : une proportion plus élevée de « bébés collodion » à la naissance, une alopécie, des complications oculaires et auditives, et une odeur corporelle désagréable. Une ichtyose KRT10 (keratinopathique) est associée à des douleurs cutanées, à une odeur corporelle désagréable et à des infections cutanées. Les patients avec une ichtyose ABCA 12 présentent des anomalies des extrémités (déformations, rétractions, pseudo-amputations), une convexité des ongles, des malformations des pavillons des oreilles, parfois des arthrites, des pustules non bactériennes et des lentigines(6). Enfin, au cours d’un syndrome de Netherton, maladie de transmission autosomique récessive par mutations SPINK5 codant la protéine LEKTI, on peut retrouver : une érythrodermie chronique ou évoluant par poussées (ichtyose linéaire circonflexe), des lésions eczématiformes ou psoriasiformes, des anomalies pilaires, un retard de croissance et des manifestations autopiques(7,8). Cette maladie est désormais mieux connue. Une fragilité particulière en période néonatale et durant la première année de vie a été mise en évidence. Les principales complications sont : la déshydratation hypernatrémique (53 à 68 % des cas), les septicémies (42 à 47 %), les troubles digestifs tels que diarrhées (26 à 42 %), vomissements (78 %) et reflux gastro-oesophagien (68 %). La moitié des patients ont un retard de développement mental. Enfin, le syndrome de Netherton peut être responsable de troubles endocriniens (rachitisme, insuffisance corticotrope, déficit ou résistance périphérique à l’hormone de croissance)(7,8).   Nouvelles approches thérapeutiques Autre avancée importante, la mise en évidence d’un profil inflammatoire Th17/IL-23 de type psoriasis dans différents types d’ichtyoses a ouvert la voie à de nouvelles approches thérapeutiques, telles que des anti-IL12/IL23 (ustékinumab) ou des anti-IL17 (sécukinumab, ixékizumab)(9,11), avec des résultats préliminaires très prometteurs. Des anti-JAK et des anti-IL23 pourraient aussi être intéressants(12-15). Au cours du syndrome de Netherton, l’inflammation peut être de type Th2 ou mixte comme dans l’atopie ; raison pour laquelle certains patients sont améliorés par le dupilumab (anti-IL4/IL13)(16-18). Ce traitement a l’avantage de restaurer la fonction barrière chez les patients atteints d’ichtyose vulgaire(19). Ces nouvelles approches thérapeutiques ne doivent pas faire oublier la très bonne efficacité des rétinoïdes par voie orale ou topique. Si le tazarotène topique n’est plus commercialisé en France, l’isotrétinoïne topique garde tout son intérêt, plus maniable et mieux tolérée que le traitement oral(20,22). Par ailleurs, il faut rappeler l’importance de la supplémentation en vitamine D (parfois à fortes doses) pour prévenir le risque de rachitisme chez ces patients(23,24). Enfin, il est important de mentionner l’arrivée dans les prochaines années de la thérapie génique ou de nouvelles molécules topiques spécifiques dans certaines ichtyoses sévères (TGM1 ou syndrome de Netherton par exemple), véritable espoir pour les malades(25,26).

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