publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Dermatologie générale

Publié le 21 fév 2023Lecture 4 min

Formes trompeuses - Quel diagnostic évoquer ?

Dominique TENNSTEDT(1) et J. DEBOIS(2), 1. Nivelles, Belgique, 2. Service de dermatologie et de vénéréologie, CHU Vaudois, Lausanne, Suisse

Une patiente de 35 ans consulte le service de dermatologie dans le cadre d’importantes lésions érythémato-squameuses fissuraires des pouces, de l’index de la main gauche et de manière très discrète du majeur gauche.

Les lésions sont apparues soudainement mais évoluent depuis près de deux ans. Les ongles sont indemnes de toute lésion (figure 1). La patiente travaille au sein d’une grande surface comme employée « polyvalente ». Elle est gauchère. L’affection est légèrement prurigineuse et nettement douloureuse. La patiente ne décrit aucune autre symptomatologie systémique à l’exception d’un prurit diffus, surtout présent en soirée. Lors de vacances ensoleillées, elle a constaté une nette amélioration de sa dermatose et une disparition des douleurs. Elle n’a pas d’antécédents atopiques personnels ou familiaux. Elle signale que son père, décédé, était atteint d’un psoriasis généralisé. Elle ne prend aucun médicament à l’exception d’une pilule estroprogestative. La patiente n’a pas de hobby particulier, si ce n’est le jardinage (essentiellement un potager). Elle possède un chat qu’elle aime caresser et qu’elle soupçonne d’être à l’origine de ses plaintes. La patiente a initialement consulté son médecin généraliste qui a posé le diagnostic d’eczéma d’étiologie indéterminée, probablement liée à son chat. Un traitement par topique contenant un émollient a été proposé pendant deux mois, sans résultat. Elle a ensuite consulté un dermatologue qui a posé le diagnostic de pulpite psoriasique et qui a recommandé la prise d’antihistaminiques puis d’acitrétine per os, associée à l’application de corticoïdes locaux puissants (clobétasol propionate). La pathologie ne s’est toutefois pas améliorée et tout traitement a été abandonné. Quel diagnoctic évoquer ? 1/ Un eczéma de contact allergique ? 2/ Une protein contact dermatitis ? 3/ Une urticaire de contact ? 4/ Une dermatite atopique ? 5/ Une pulpite hyperkératosique ? 6/ Une pulpite psoriasique ? 7/ Une dysidrose ? 8/ Une tinea manum ? 9/ Une dermatite d’irritation ? 10/ Une autre pathologie ? Quelles questions faut-il poser ? Quel examen faut-il proposer ? Que proposer ?  le diagnostic à proposer est celui de dermatite de contact allergique.Cependant d’autres diagnostics pourraient être évoqués !  les questions à poser sont : travaillez-vous souvent comme caissière au sein de la grande surface qui vous emploie ? Réponse de la patiente : oui.  supportez-vous les boucles d’oreilles « fantaisie » ? Réponse de la patiente : non.  l’examen à envisager est la réalisation de tests épicutanés (patch tests). Les tests épicutanés ont été effectués et ont permis de mettre en évidence une sensibilisation importante au nickel (figure 2). Une pièce de 1 euro a également été testée (figure 3). Figure 2. test ++ au nickel. Figure 3. test ++ avec pièce de 1 euro. La topographie des lésions observées chez la patiente correspond aux gestes de préhension de la monnaie qu’elle manipule « à longueur de journée » lors de son travail comme caissière. La patiente a demandé et obtenu un changement de poste. Elle travaille désormais au réassort des rayons et non plus à la caisse. Un traitement symptomatique par un émollient gras à appliquer le soir a été recommandé et une guérison en moins de 2 mois a été observée. Aucune récidive n’a été constatée dans les 12 mois qui ont suivi. Le diagnostic final est donc bien celui de dermatite de contact allergique au nickel à type de pulpite allergique. Un flacon contenant du diméthylglyoxime (spot test au nickel) a été remis à la patiente afin qu’elle puisse tester elle-même les divers objets métalliques de son environnement : apparition d’une coloration rosâtre sur un coton tige imbibé de la solution et frotté sur tous les objets suspects (détection du nickel relargable à partir de 5 à 10 ppm) (figures 4 à 7). Les principales professions prédisposant à la dermatite de contact au nickel des euros sont celles d’employé(e)s de caisse, de banques, et les chauffeurs de taxi. L’image clinique correspond en général à une pulpite sèche et crevassée du pouce et de l’index du côté dominant. Depuis le mois de janvier 2002, les nouvelles pièces en euros font partie intégrante de la vie quotidienne. De nombreux auteurs se sont penchés sur leur contenance en nickel et sur les conséquences quant à la genèse d’une sensibilisation au nickel, et plus vraisemblablement à la pérennisation d’une dermatose chronique liée à une sensibilisation préalable à ce métal. De manière relativement étonnante, les pièces de monnaie ne sont pas directement visées par la directive européenne concernant le nickel, car elles ne sont pas considérées comme « produit destiné à rester en contact direct et prolongé avec la peau ». Il semblerait que les pièces de 1 euro et celles de 2 euros larguent environ 300 fois plus de nickel que le taux autorisé par la directive européenne, tout en sachant que cela ne tient pas compte de l’éventuel effet de la transpiration quant à la dissolution du nickel à partir de ces pièces. Figure 4. Spot test nickel sur trousseau de clefs. Figure 5. Spot test nickel sur trousseau de clefs (fort grossissement). Figure 6. Spot test sur divers pièces de monnaie. Figure 7. Spot test sur paires de ciseaux.

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème