publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Congrès

Publié le 11 mai 2020Lecture 7 min

Les anomalies des cheveux et du cuir chevelu de l’enfant

Catherine FABER, Paris

Quelle doit être la démarche diagnostique devant des anomalies des cheveux chez l’enfant ? Réponse dans ce compte rendu d’une présentation qui a fait le point sur certaines des nombreuses pathologies en cause à partir de cas cliniques et des données récentes de la littérature.

Il convient tout d’abord de différencier les anomalies localisées des anomalies diffuses. Anomalie localisée  La démarche diagnostique devant une anomalie des cheveux localisée est guidée par l’état du cuir chevelu (normal ou anormal) (figure 1) et des cheveux, mais aussi du caractère congénital ou acquis de l’anomalie, de l’histoire clinique du patient et des anomalies associées pouvant faire penser à un syndrome. Figure 1. Démarche diagnostique devant une anomalie localisée. • Chez un enfant ayant un cuir chevelu anormal, on peut notamment évoquer, selon le contexte clinique, un nævus sébacé, une teigne, une aplasie cutanée. – Le nævus sébacé (NS) appartient au groupe des nævi épidermiques dont il est la forme la plus fréquente (50 %). Il se manifeste par une lésion saumonée, avec une surface décrite comme « douce et cireuse », généralement localisée sur le cuir chevelu ou sur la face. D’après des données récentes, le NS est secondaire à des mutations postzygotiques de la voie RAS(1). Le plus souvent isolé, il peut aussi s’inscrire dans une forme syndromique : le syndrome du NS qui comprend des anomalies neurologiques (retard mental, convulsions) et ophtalmologiques (colobome) et doit être suspecté en présence d’une lésion extensive avec localisation centrofaciale. Le risque est surtout esthétique et fonctionnel, lié à l’épaississement de la lésion qui peut devenir variqueuse. Le NS est une tumeur bénigne. La possibilité d’une prolifération basaloïde à l’âge adulte peut justifier une exérèse prophylactique, mais sans urgence et après discussion avec le pathologiste. – Les teignes inflammatoires ont un aspect clinique trompeur « très bactérien ». Elles doivent être différenciées des formes non inflammatoires. Les agents pathogènes en cause sont plus volontiers anthropophi les que zoophi les . La f réquence de ces teignes dépend des zones géographiques. Elles relèvent d’un traitement antifongique local et général avec l’un des deux principaux antifongiques systémiques à savoir la griséofulvine et la terbinafine(2,3). Le plus prescrit, le moins coûteux et le seul à disposer d’une AMM en Europe et en France est la griséofulvine. Les deux molécules donnent de bons taux de guérison, mais leur efficacité dépend du type de dermatophyte, avec un avantage pour la griséofulvine s’il s’agit d’un Microsporum et pour la terbinafine sur les teignes à Trichophyton. – L’aplasie cutanée congénitale fait partie des maladies rares. Sa prévalence est de l’ordre de 1/10 000 naissances vivantes. Elle se caractérise par l’absence de peau à la naissance avec, parfois, déjà une cicatrice. Des formes bulleuses ont été décrites. Cette affection est isolée ou survient dans le cadre d’un syndrome comportant des anomalies cérébrales. Elle peut aussi être associée à des anomalies osseuses sous-jacentes pour lesquelles des facteurs de risque ont été identifiés : une lésion de plus de 5 cm ou supérieure à 5 cm, une localisation médiane au vertex, la présence d’un signe du collier de cheveu, d’anomalies capillaires, de nodules(4). Une imagerie est recommandée par échographie chez l’enfant de moins de 6 mois ou IRM audelà. Il a également été constaté que les enfants ayant un signe du collier de cheveu ou une touffe de cheveux sont à haut risque d’anomalies sousjacentes diverses et, par conséquent, doivent bénéficié d’une radiographie du crâne et d’une IRM cérébrale(5). • Dans les anomalies localisées avec cuir chevelu normal, l’orientation diagnostique repose sur l’existence ou non d’anomalies de texture et de couleur, et sur la présence des cheveux. Plusieurs pathologies peuvent être en cause comme la pelade, la trichotillomanie, l’alopécie androgénogénétique, le nævus achromique, le vitiligo. – Un bilan thyroïdien est recommandé dans la pelade chez les enfants ayant une trisomie 21, des antécédents personnels d’atopie ou une histoire familiale de maladie thyroïdienne ou s’il existe des signes cliniques évocateurs(6). – Caractérisée par un arrachage compulsif des cheveux, cons - cient ou inconscient, la trichotillomanie affecte les grands enfants (9-13 ans), surtout les filles, et se manifeste par une alopécie de forme bizarre et des cheveux cassés(7). La trichoscopie montre des cheveux en « tulipe ». Les comorbidités psychiatriques sont fréquentes, en particulier les troubles de l’humeur. Il est important de diagnostiquer la trichotillomanie en raison de sa progression clinique et des séquelles psychologiques qu’elle entraîne. – L’alopécie androgénogénétique (AAA) a deux présentations cliniques : une anomalie au niveau du vertex chez les enfants prépubères des deux sexes et chez les filles correspond à un « pattern féminin » ; le « pattern mascu - lin » se caractérise par une localisation au niveau du vertex et des zones bitemporales après la puberté chez les garçons(8). Il faut rechercher une histoire familiale d’AAA, évaluer le stade pubertaire en utilisant les stades de Tanner, chercher des signes cliniques d’hyperandrogénie chez la fille et faire un examen en der - moscopie. La trichoscopie retrouve plus de 20 % de variation de diamètre des cheveux. Le minoxidil n’a pas d’AMM pédiatrique. Il peut être utilisé aux mêmes doses que chez l’adulte. Son efficacité et sa sécurité chez l’enfant sont mal connues. Certains utilisent d’autres traitements systémiques pour lesquels il y a également t rès peu de données (inhibiteurs de la 5 alpha-réductase, spironolactone, contraceptifs oraux). – Les principaux diagnostics différentiels des anomalies de couleur de type mèche blanche sont le vitiligo, le nævus achromique, l’albinisme, le piebaldisme, la pelade (possible repousse de cheveux blancs). Anomalie diffuse   Le critère initial d’orientation diagnostique est la densité capillaire qui peut être normale, diminuée ou augmentée (figure 2). Figure 2. Démarche diagnostique devant une anomalie diffuse. • En cas de densité normale, on peut observer une anomalie de la couleur des cheveux isolée dans l’albinisme ou d’autres syndromes. • En cas de densité augmentée, on parle de cheveux laineux, qui peuvent être isolés ou associés à des anomalies cutanées (kératodermie palmoplantaire ou extracutanées : cardiopathie) • En cas de densité diminuée – En cas de cheveux normaux, il convient de réaliser un test de traction (prendre quelques cheveux entre pouce et index et tirer lentement, idéalement à distance de 48 h des shampoings). Sa positivité (> 5 che - veux) évoque avant tout un effluvium télogène. Ce dernier survient en général quelques mois après un événement comme une maladie, un stress, la prise d’un médicament. Il correspond à un passage massif en phase télogène et est spontanément résolutif. D’autres diagnostics peuvent être évoqués comme une pelade diffuse ou une carence en fer, une dysthyroïdie etc. – En cas de cheveux « grossiers » sans être totalement anormaux, on peut alors envisager soit le diagnostic d’hypotrichose si ce signe est isolé ou de dysplasies ectodermiques — et d’autres syndromes — s’il est associé à d’autres signes. Parmi ces syndromes on note : 1- le syndrome de Rapp- Hodgkin fait partie du groupe des dysplasies ectodermiques (DE). Il est également connu sous les noms d’AEC (Ankyloblepharon Ectodermal dysplasia Clefting) Syndrome et de Hay-Wells syndrome. Ce syndrome se caractérise par des lésions érosives puis croûteuses du cuir chevelu et des cheveux rares, épais, drus, et un faciès particulier avec une large voûte nasale, une petite lèvre supérieure et un grand front(9). Les autres manifestations possibles incluent des anomalies des dents et des ongles, une hypohidrose, une fente palatine, un ankyloblépharon (soudure des paupières) ; 2- la dysplasie ectodermique anhidrotique (DEA). C’est la plus fréquente des DE. Elle est liée à l’X et due à des mutations du gène EDA qui code pour l’ectodylasine A. Elle atteint uniquement les garçons (les femmes vectrices ont des signes atténués). La triade hypotrichose, hypohidrose, hypodontie est caractéristique de la DEA. Après des études chez la souris, une équipe a testé avec succès l’injection par voie intra-amniotique directe d’une protéine recombinante (Fc-EDA) chez trois foetus hémizygotes de deux grossesses de mères hétérozygotes(10). Dans les hypotrichoses, contrairement aux DE, il n’y a pas d’anomalies des ongles et des dents. L’atteinte concerne uniquement les cheveux, parfois les cils et les sourcils. Le profil évolutif est variable : soit des cheveux normaux à la naissance puis une chute (hypotrichose simplex), soit une absence de cheveux puis une pousse ultérieure (Marine Unna hypotrichosis). L’hypotrichose est le plus souvent isolée, mais elle peut s’intégrer dans différents syndromes. La transmission est le plus souvent autosomique dominante. – En cas de cheveux anormaux, le bilan étiologique comprend, hormis l’examen clinique et les antécédents, un examen trichoscopique et un examen en microscopie optique des cheveux. Dans le monilethrix, il montre une alternance régulière de renflements et de strictions. Des cheveux aplatis qui tournent autour de leur axe caractérisent le pili torti. Cette anomalie de la tige pilaire peut être isolée ou associée à différents syn - dromes. L’invagination de la partie distale dans la partie proximale du cheveu est un signe de syndrome de Nétherton ou trichorrhexie invaginata. Ce syndrome se caractérise par la triade alopécie, atopie et une ichtyose dite linéaire circonflexe. Enfin, la présence de cheveux tigrés en lumière polarisée oriente vers une trichothiodystrophie. • Une absence totale de cheveux est observée dans la pelade totale ou universelle et dans l’atrichie congénitale.

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème