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Allergologie

Publié le 03 mai 2024Lecture 4 min

Une augmentation des allergies de contact aux acrylates

Catherine FABER, d’après la communication de P. Marcant, Lille, CFA 2024

Il existe de multiples sources d’exposition aux (méth)acrylates, principalement professionnelles, médicales et esthétiques. Les allergies de contact professionnelles à ces molécules concernent au premier chef la dentisterie et l’onglerie. Elles sont moins fréquentes dans d’autres secteurs comme les industries de l’imprimerie, de la peinture, des revêtements adhésifs et des produits d’étanchéité.

En matière d’allergie professionnelle de contact aux (méth)acrylates(1), l’onglerie a supplanté la dentisterie. Elle en est devenue le premier pourvoyeur. En cause, l’augmentation de l’exposition des esthéticiennes et des prothésistes ongulaires consécutive à l’utilisation plus fréquente des vernis semi-permanents et des faux ongles. Au cours de leur activité, ces professionnelles manipulent différents produits pouvant contenir des acrylates et des méthacrylates. C’est par exemple le cas lors de la pose du vernis semi-permanent qui nécessite l’application d’une première couche (primer), puis d’une base, du vernis semi-permanent et d’un gel de finition (top coat), avec un durcissement de chaque couche sous lampe UV ou LED. Des résines acryliques sont aussi utilisées dans la préparation des ongles artificiels. L’allergie se manifeste typiquement par une pulpite hyperkératosique, fissuraire et douloureuse avec une diminution de la sensibilité tactile. Devant ce tableau caractéristique, le diagnostic peut être quasi certain, avant même d’être confirmé par l’exploration allergologique. Les lésions des doigts s’associent parfois à une atteinte du visage, des paupières et du cou par voie manuportée ou aéroportée (retrait du vernis par polissage). Pour leur part, les professionnels de la dentisterie sont exposés aux acrylates et méthacrylates des résines composites – qui ont remplacé le mercure dans les amalgames – et au 2-HEMA (méthacrylate de 2-hydroxyéthyl) des agents adhésifs utilisés pour obtenir une adhésion plus solide des matériaux d’obturation et des ciments de scellement. Dans ce milieu, les acrylates les plus fréquemment en cause dans les allergies de contact sont le 2-HEMA chez les dentistes et les assistantes dentaires, et le MMA (méthacrylate de méthyle) chez les prothésistes dentaires. La sensibilisation a lieu lors du contact avec des instruments médicaux ou des surfaces de travail contaminés, ou à l’occasion de l’ouverture et de la fermeture des flacons. En ce qui concerne les sources médicales, les acrylates sont présents dans des prothèses dentaires, des colles chirurgicales (cyanoacrylates), des ciments de prothèse orthopédique et des adhésifs de sparadrap, de pansements hydrocellulaires ou d’électrode, mais aussi potentiellement dans le matériel de tests épicutanés. Des cas d’allergies de contact aux acrylates ont été décrits avec des lecteurs glycémiques et des pompes à insuline sans tubulure. Dans ces dispositifs, l’allergène responsable est l’isobornyl acrylate (IBOA)(1-3). Il est présent dans la colle qui unifie l’ensemble des éléments du dispositif, et non dans l’adhésif, et migrerait jusqu’à la peau. Les cosensibilisations entre l’IBOA et les lactones sesquiterpéniques sont fréquentes. Une observation d’allergie de contact à l’IBOA d’un bracelet d’identification été rapporté chez un patient hospitalisé(4). Dans le domaine esthétique, les vernis semi-permanents et les ongles artificiels sont incriminés dans un nombre croissant d’allergies de contact non professionnelles aux acrylates, chez des patientes de plus en plus jeunes. Il existe également un risque de réaction allergique de contact aux acrylates utilisés dans la colle des extensions de cils, qui est parfois une colle chirurgicale détournée de son usage, et dans des teintures de cils. Plusieurs batteries (méth)acrylates spécifiques sont disponibles (imprimerie, ongles artificiels, colles et produits dentaires). La batterie standard européenne contient du 2-HEMA. Ce marqueur de sensibilisation aux méthacrylates a été choisi parce qu’il n’entraîne pas a priori de sensibilisation active. Il est plus performant pour détecter les sensibilisations aux méthacrylates qu’aux acrylates. Les allergies de contact professionnelles aux acrylates peuvent avoir des conséquences majeures, particulièrement dans le secteur de l’onglerie. Les seuls gants assurant une protection vraiment efficace chez les patients allergiques sont les gants en laminé multicouches de polyéthylène avec lesquels il n’est pas possible d’exécuter des gestes de grande dextérité et dont le coût est élevé. Ces allergies sont réparables par les tableaux 65 pour les lésions eczématiformes de mécanisme allergique et 82 pour les affections provoquées par le MMA. D’autres allergènes émergents que l’IBOA et les colles cyanoacrylates seront probablement identifiés dans les années à venir.   Des propositions de substitution, mais… D’après la communication de S. Caillol, CNRS - Institut Charles Gerhardt, Montpellier Les acrylates et les plastiques sont utilisés pour de nombreuses applications. Difficile donc de les éviter dans la vie quotidienne. Les acrylates sont obtenus par un processus de polymérisation. Certes, les polymères ne sont pas sensibilisants, mais il reste toujours des monomères résiduels non polymérisés. Ainsi, tous les acrylates sont plus ou moins toxiques, irritants et peuvent provoquer une allergie cutanée. Dans les gels coat, ils peuvent être remplacés par des résines époxy, mais elles sont aussi à l’origine d’allergies de contact. D’autres polymères de remplacement ont été proposés comme les polyuréthanes/urées pour les colles rapides type « super glue » et les résines alkydes pour les revêtements. Le risque d’irritation ou de sensibilisation avec certaines de ces résines ne peut pas non plus être écarté. Des solutions sont actuellement recherchées pour réduire l’impact environnemental des polymères issus de la pétrochimie. Dans ce cadre, le cardanol, un extrait biosourcé de l’huile non alimentaire de coque de noix de cajou, a été utilisé pour obtenir des polymères de faible Tg – température à laquelle le polymère « ramollit » – (Caillol S et al. 2017, 2018). L’effet allergisant de ce composé n’a pas été testé. On peut toutefois penser qu’il y a un moindre risque de sensibilisation avec l’acrylate de cardanyl. Des travaux sont également menés sur des polymères à base d’eugénol, un phénol naturel obtenu à partir de l’huile de clou de girofle (Caillol S et al. 2023).

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