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Allergologie

Publié le 24 aoû 2006Lecture 7 min

Allergies graves : quand et comment prescrire de l’adrénaline ?

Dr F. Rancé, hôpital des Enfants, Toulouse
Le choc anaphylactique, l’œdème laryngé et l’asthme aigu grave représentent les situations cliniques les plus graves. L’adrénaline est indiscutablement le traitement de choix. L’adrénaline s’utilise à la dose de 0,01 mg par kilo, par voie intramusculaire, dans la cuisse, à l’aide des dispositifs auto-injectables. La prescription d’adrénaline doit s’accompagner d’un programme d’éducation, d’information et de suivi thérapeutique.
Les situations avec risque de choc anaphylactique ou engageant le pronostic vital connaissent un net accroissement de leurs fréquences depuis une dizaine d’années. Ils existent peu de données sur la prévalence exacte du choc anaphylactique. Néanmoins, on peut estimer qu’il atteint 1 à 2 personnes pour 100 000 habitants. Il est plus fréquent chez l’adulte que chez l’enfant. Ses causes sont multiples, mais largement dominées par les aliments chez l’enfant(1). Le latex, les piqûres d’hyménoptères, les médicaments, les vaccins et l’exercice représentent les principales autres étiologies. L’adrénaline est le traitement de choix du choc anaphylactique(2). Les effets secondaires, en particulier chez l’enfant, sont tout au plus modérés et transitoires, et surtout le retard à son emploi dans les accidents sévères est un des facteurs mis en avant pour expliquer les évolutions fatales(1). La prescription d’adrénaline est variable selon les pays : large aux États-Unis, en Australie et surtout au Canada ; elle est restreinte au choc anaphylactique et à l’asthme en Grande-Bretagne. La mise à disposition, en France, de dispositifs auto-injectables d’adrénaline à usage unique pourrait augmenter le nombre des prescriptions. Avant tout, il convient de rappeler que toute prescription d’adrénaline doit s’accompagner d’un diagnostic allergologique précis, d’un programme d’éducation, d’information et de suivi thérapeutique.   Toute prescription d’adrénaline doit s’accompagner d’un diagnostic allergologique précis, d’un programme d’éducation, d’information et de suivi thérapeutique.   Quand prescrire de l’adrénaline ? L’adrénaline est obligatoire dans la trousse d’urgence des patients allergiques qui ont déjà présenté des signes graves : choc anaphylactique, œdème laryngé, asthme aigu grave. Il existe aussi des situations cliniques identifiées dans le déclenchement d’une réaction allergique grave(3,4). Elles justifient d’inclure de l’adrénaline dans la trousse d’urgence (tableau 1).     L’âge Le choc anaphylactique est plus fréquent chez l’adolescent et l’adulte jeune que chez le jeune enfant. L’adrénaline est prescrite chez les enfants âgés de plus de 6 ans souffrant d’une allergie alimentaire à l’arachide ou aux fruits à coque, même si les signes initiaux sont minimes. L’asthme L’asthme, signe de l’allergie ou simplement associé à l’allergie, représente un facteur de risque majeur pour déclencher une réaction sévère lors d’expositions accidentelles à l’allergène(5). L’allergique aux aliments et asthmatique doit avoir en sa possession de l’adrénaline. Les réactions pour des quantités minimes d’allergène. La quantité d’aliment ingéré représente un élément décisif pour le déclenchement d’une réaction allergique plus ou moins sévère. Les patients qui réagissent pour des quantités minimes d’allergènes (moins de 100 mg d’aliments lors du test de provocation par voie orale, formes masquées, réactions au baiser) sont exposés à une réaction plus forte avec une grande quantité d’aliments.  Le type d’allergène L’arachide, les fruits à coque, les poissons, les crustacés et le sésame sont des aliments connus pour déclencher des réactions sévères. De plus, les réactions pourraient s’aggraver au fur et à mesure des expositions accidentelles. Affection pré-existante Des réactions sévères ont été décrites, notamment dans la mastocytose systémique. Comment prescrire l’adrénaline ? L’adrénaline est encore sous-utilisée. Le rapport du programme de surveillance canadienne des anaphylaxies enregistre une utilisation d’adrénaline dans seulement 32 % des anaphylaxies alors que les antihistaminiques ont été employés dans 54 % des réactions allergiques graves.  La voie d’administrationest mise en évidence par Simons et coll.(7), à partir de 94 publications référencées sur l’utilisation de l’adrénaline par voie sous-cutanée. La supériorité du site d’injection dans la cuisse (en comparaison avec le bras) ainsi que des dispositifs auto-injectables par rapport aux autres sont démontrés(8). La dose recommandée est de 0,01 mg/kg.  La voie intraveineuse est parfois employée au cours des chocs sévères, même si elle est moins bien tolérée.  Les autres voies d’administration de l’adrénaline n’ont pas d’indications : la voie inhalée a une efficacité identique au placebo et la voie sublinguale nécessiterait des doses supérieures à la dose toxique. L’utilisation des ampoules d’adrénaline à reconstituer n’est pas recommandée : les patients perdent du temps et la dose administrée n’est jamais constante. La supériorité de la voie intramusculaire est démontrée.   Les effets secondaires de l’adrénaline Les effets secondaires indésirables d’une injection d’adrénaline sont en règle générale mineurs et transitoires : palpitations, difficultés respiratoires, pâleur, étourdissements, faiblesse, tremblements, anxiété, maux de tête, fièvre, hypertension artérielle brutale. Il a également été rapporté des manifestations plus sévères : arythmie cardiaque létale, œdème pulmonaire et hémorragie cérébrale. L’absence de réponse à l’adrénaline Les dispositifs auto-injectables à usage unique d’adrénaline aux posologies de 0,15 et 0,3 mg sont à l’origine de surdosage dans 6,7 % des cas, et de sous-dosage dans 0,6 % des cas(9). L’absence de réponse à une injection d’adrénaline provient d’une des situations suivantes : – retard à l’injection ; – erreur dans le choix de la voie d’administration ou de la dose ; – utilisation d’un dispositif périmé ; – traitement concomitant par inhibiteurs de l’enzyme de conversion ; – allergie aux sulfites ; – ou bien, évolution explosive. L’adrénaline n’arrête pas un choc établi avec troubles de l’hémodynamique. Les dispositifs auto-injectables à usage unique Anapen® est le seul dispositif auto-injectable disponible en France. Il se conserve à température ambiante. Son utilisation est unique et deux dosages sont disponibles (0,15 mg avant 20 kg et 0,30 mg au-delà de 20 kg) (tableau 2). Il convient de respecter la date de péremption pour une efficacité optimale. Les dispositifs auto-injectables sont plus résistants au froid extrême en comparaison avec une exposition à une chaleur intense.     Les interactions médicamenteuses et les précautions d’utilisation de l’adrénaline Il n’existe pas de réelle contre-indication à l’utilisation de l’adrénaline, surtout en situation d’urgence. Toutes les présentations de l’adrénaline contiennent des sulfites. Elles sont pourtant autorisées chez le patient intolérant aux sulfites en cas de choc anaphylactique. L’adrénaline est déconseillée chez le patient cardiaque (insuffisance coronarienne sévère, myocardiopathie obstructive, trouble du rythme ventriculaire) du fait d’une augmentation de la réactivité cardiaque. Néanmoins, des études supplémentaires sont nécessaires pour contre-indiquer l’adrénaline chez les patients cardiaques. Des précautions sont nécessaires chez le patient diabétique, hyperthyroïdien ou atteint d’athérosclérose. L’association de l’adrénaline aux thérapeutiques suivantes est déconseillée : anesthésiques volatils halogénés, antidépresseurs imipraminiques, antidépresseurs sérotoninergiques-noradrénergiques et guanéthidine. En pratique L’adrénaline s’utilise avec les dispositifs auto-injectables, par voie IM, dans la cuisse. La posologie est de 0,15 mg pour des poids < 20 kg et de 0,3 mg pour des poids > à 20 kg. Il reste à développer de nouvelles formulations permettant d’adapter mieux les doses aux poids du patient. L’étape suivante, éducative, est aussi essentielle pour la mise en place des différentes mesures de prévention : plan d’action en cas de réaction par exposition accidentelle, apprentissage de la technique de l’auto-injection, carte d’identité précisant les allergies, protocole d’accueil individualisé en milieu scolaire et périscolaire.

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