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Maladie de système, Médecine interne

Publié le 01 oct 2019Lecture 4 min

La dermatoporose, simple expression de la sénescence cutanée ?

C. BARTHAUX, Saint-Malo

À travers l’expérience de deux cas cliniques, nous précisons l’approche étiologique du purpura de Bateman et, à plus large échelle, de la dermatoporose, observées essentiellement sur les zones photoexposées.

Cas clinique 1  Madame L., âgée de 93 ans, vient consulter pour un état de fragilité vasculaire caractérisé par une tendance hémorragique cutanée tachant ses draps de lit. Lors de sa première consultation, il lui est conseillé l’usage de compresses aux alginates douées de propriétés hé - mostatiques pour limiter ses saignements cutanés. Elle revient 6 mois plus tard avec un purpura plan non infiltré ecchymotique prédominant aux membres inférieurs (figure 1, A et B). À l’interrogatoire, elle signale qu’elle vit depuis des années dans une institution de convalescence gérée par des religieuses où son alimentation est composée quasi exclusivement de féculents. Cette notion intrigante nous fait demander un bilan sanguin montrant un taux indosable de vitamine C sérique. Lorsque les lésions purpuriques cutanées chroniques (pétéchies, ecchymoses) sont marquées chez une personne âgée en situation de trouble alimentaire, même sans poils en tire-bouchons ni purpura péripilaire, une carence en vitamine C doit être évoquée de principe. À ce titre, il est regrettable que le dosage sérique de la vitamine C ne soit pas pris en charge par les organismes sociaux (coût : 42 euros). Cas clinique 2 Madame C., âgée de 70 ans, est suivie pour une héliodermie du front. Elle présente une atrophie cutanée marquée sur ses avant-bras avec des hématomes spontanés nombreux et des lacérations cutanées impressionnantes (figure 2). Elle a stoppé sa consommation de tabac depuis 2 ans, mais sa bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) sévère lui fait consommer depuis plus de 7 ans 500 µg de fluticasone par dose en inhalation biquotidienne soit 1 000 µg par jour. La consommation de corticoïdes oraux (dans diverses indications comme en rhumatologie ou après greffe d’organe, etc.), lorsqu’ils sont consommés à long terme induit une atrophie épidermique, des troubles de  la cicatrisation et une fragilité vasculaire. Ces lésions sont alors flagrantes sur les quatre membres, plus précisément les faces dorsales des mains, les avant-bras et les régions prétibiales. Le visage peut aussi montrer des signes d’imprégnation cortisonique sous forme d’une rosacée cortico-induite, d’une acné péribuccale, ou d’un purpura facial. Les dermocorticoïdes ont acquis à leur tour ces dernières années une mauvaise réputation médiatique ce qui facilite aujourd’hui des conduites disproportionnées et des idées fausses dans la population en lien direct avec la corticophobie. Étonnamment, j’ai pu constater le phénomène inverse pour les formes inhalées des corticoïdes (béclométasone, budésonide, fluticasone, mométasone ou ciclésonide pour un asthme et/ou une BPCO). En effet, de nombreuses personnes atteintes d’une maladie bronchique chronique en consomment sans même se soucier de la dose utilisée et encore moins des effets secondaires systémiques potentiels sur leur organisme, en particulier les métabolismes surrénalien et osseux. Ces derniers sont réputés exceptionnels ou rares (moins d’une personne sur 10), jusqu’à la dose de 1 000 à 1 500 µg/j d’équivalent béclométasone chez l’adulte (tableau) alors qu’en clinique on constate une fréquence élevée de troubles systémiques cutanés (figures 3 à 5). Cette fragilité cutanée iatrogène augmente avec l’âge du patient, la dose quotidienne et la durée de la corticothérapie inhalée même si les auteurs s’accordent sur l’absence habituelle d’effet nocif associé sur les glandes surrénales et le métabolisme osseux(1,2). Chez les personnes adultes et âgées, la recherche de la posologie minimale quotidienne efficace chez l’asthmatique ou l’insuffisant respiratoire est donc fondamentale en pratique afin de limiter les effets cutanés de la corticothérapie inhalée (pneumologie), instillée (ORL) ou orale au long cours au même titre que la gestion des doses (grammage) utilisées d’un topique corticoïde en dermatologie(3). Conclusion Le terme de dermatoporose a été proposé par analogie avec l’ostéoporose pour désigner le vieillissement cutané. Sur le plan clinique, elle est caractérisée par une atrophie cutanée, un purpura plan, des cicatrices blanches. La peau atrophique est plus fragile (figure 6), la cicatrisation est ralentie laissant des marques définitives (figure 7, A et B). Des hémorragies superficielles sont fréquentes avec parfois des hémorragies profondes sévères disséquantes. En conséquence, la répercussion fonctionnelle et esthétique de la dermatoporose impacte très significativement la qualité de vie quotidienne. Chez de nombreuses personnes âgées de 50 ans et plus, de nombreux facteurs peuvent accélérer la fragilité vasculaire cutanée liée a l’âge : la prise d’antiagrégants plaquettaires (aspirine, clopidrogel), d’anticoagulants oraux (antivitamine K, nouveaux anticoagulants oraux) (figure 8, A et B), une thrombopénie (taux < 40 000 éléments par mm3 ), les corticoïdes pris au long cours, un diabète, une carence en vitamine C, mais aussi un mécanisme d’héliodermie (expositions cumulatives aux ultraviolets naturels) sur les parties découvertes, ainsi qu’un déficit vasculaire veineux des jambes.

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